11.7.08

UN FRONT DE LA "PETITE" PRESSE

Ce qu'on appelle la « petite » presse constitue en fait l'une de ces organisations qui, lorsqu'elles sont déjà correctement orientées, peuvent favoriser l'éclosion de réseaux sociaux naturels dans le sens favorable.

A cet égard, une mention toute spéciale peut être réservée à cette « petite » presse en raison de ses possibilités particulières d'efficacité. Parce qu'elle a vocation d'information, il entre dans son rôle d'aider à la formation des esprits ; et parce qu'elle possède son « réseau » d'abonnés et son système de diffusion, elle peut contribuer à la structuration des ensembles humains et à la coordination de leurs activités contre la Révolution.

Il ne faut pas ignorer l'individualisme – parfois négativiste – de certaines publications ou revues qui voient d'un mauvais œil toute idée de « mise en commun » de quoi que ce soit avec un collègue, ne fût-ce que l’acceptation d'une même idée de manœuvre contre la Révolution... Certes, il est légitime que chacun veuille préserver sa personnalité, et c’est d’ailleurs cette personnalité qui lui vaut sa clientèle. Elles peuvent garder jalousement leurs caractères propres, mais leur accord sur les mêmes idées essentielles doit leur faire admettre la nécessité d'une tentative de coordination de leurs efforts. Quelqu'un pourrait-il le refuser devant l'importance de l'enjeu ?

On entend parfois déclarer : « Nous ne pourrons rien faire tant que nous n'aurons pas les mass média... » Mais non ! La possession des mass média supposerait en fait le problème résolu ! A l'heure actuelle, qui pourrait envisager la possibilité d'obtenir des moyens d'une telle importance ? « Avoir » les mass media est donc exclu, si ce n'est en les gagnant peu à peu au cours d'une évolution de l'opinion publique, ceci étant l'une des conséquences naturelles de l'action politico-sociale à mener. Il est évident que cette évolution pourrait se trouver singulièrement accélérée par certains événements mondiaux ou nationaux.

La « grande » presse est également hors de portée, mais celle que l'on qualifie de « petite » a autrement plus de mérite. Il est bien entendu qu'il s'agit ici de celle qui défend les principes de notre Civilisation chrétienne – même quand le terme « chrétien » n'est pas affiché – et qui, en outre, non seulement n'attend rien de certains adversaires de notre Civilisation, mais sait « se compromettre » jusqu'à les désigner pour ce qu'ils sont. Elle se bat pour faire passer les idées essentielles : celles qui n'intéressent plus une masse en quête de lectures faciles et distrayantes, celles qui n’augmenteraient ni la clientèle ni les bénéfices des organismes de « grande presse »…

Notre « petite » presse, en revanche, s’adresse à une élite relative qui, hélas, n’as pas pour l’instant de chef « sur le terrain ». Elle réussit à survivre dans l'attente d'un réveil dynamique de la part du Pays réel... C'est celle que tant d'hommes s'obligent à recevoir et à lire parce qu'elle est déjà bien orientée ; celle qui est faite de toutes ces revues, périodiques, illustrés, magazines, bulletins mensuels, feuilles hebdomadaires qui, au total, font un tirage mensuel dépassant peut-être le million. Mais ce nombre ne prend sa valeur réelle qu'au regard de la qualité que nous pouvons en attendre.

Après l'action individuelle, courageuse, obstinée, souvent menée isolément par ces éléments, un front de cette petite presse peut se manifester de façon plus tangible. Sa base pratique résidera en une coordination des efforts sur des idées simples et des recommandations adaptées aux circonstances politico-sociales du moment.

Qui formulera ces recommandations, et sous quelle forme ? Cela est un problème d'action, à prendre en tant que tel par les intéressés ; et sans entrer ici dans le détail de cette étude, il semble qu'une solution pourrait s'orienter vers une concertation de chefs naturels s'appuyant sur une étude prospective poursuivie au jour le jour par un comité de réflexion.

La petite presse en serait la première bénéficiaire et, en retour, le front de la petite presse peut devenir le support le plus précieux d'une action civique à l'échelon national.

Extrait de La Voix du Pays réel du Colonel Chateau-Jobert

12.6.08

LE CONTRAT SOCIAL (tiré de la Conjuration Antichrétienne de Mgr Delassus

J.-J. Rousseau s'inscrivit en faux contre ces données de la raison et de la foi ; et voici ce qu'il imagina, ce qu'il consigna dans tous ses écrits, et ce que la maçonnerie s'est donnée la mission de réaliser. La société, l'état social, ne résulte point de la consti­tution de l'homme et de l'institution divine; c'est, dans le monde, une excroissance accidentelle et l'on pourrait dire contre nature, qui est survenue un beau jour par le fait des volontés humaines.
Les hommes vivaient à l'état de nature, dit J.-J. Rousseau, comme le font les sauvages, les animaux, et c'était l'âge d'or; état de liberté et d'égalité, où les fruits étaient à tous et la terre à personne, où chaque homme était citoyen de l'univers.
Pour passer de l'état de nature à l'état social, les hommes primitifs firent un pacte, un contrat, « le contrat social (1) ». D'une part, chaque indi­vidu se remit, sa personne et tous ses droits, entre les mains de tous; d'autre part, tous garantirent à chacun une part égale des biens communs. L'individu donna à la société tout ce qu'il a et tout ce qu'il est, et la société admit l'individu à la communion de toute la chose publique, de la république.
« Les clauses du pacte social, dit J.-J. Rousseau (2), se réduisent toutes à une seule : l'aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté... S'il restait quelques droits aux particu­liers, l'état de nature subsisterait et l'association deviendrait nécessairement vaine... L'aliénation se faisant sans réserve, l'union est aussi parfaite qu'elle peut l'être, et nul associé n'a plus rien à réclamer. »
Voilà l'idée que la maçonnerie se fait de la so­ciété, voilà le plan sur lequel elle veut la reconsti­tuer. Si longtemps que cela ne sera point complète­ment réalisé, c'est-à-dire si longtemps que les indi­vidus prétendront conserver quelques droits, l'état social, tel que le contrat l'a fait, tel qu'il doit être, ne sera point jugé parfait; l'état de nature, auquel le contrat a voulu mettre fin, subsistera en quelque chose. Le progrès, c'est donc la marche vers l'absorption complète de tous les droits par l'Etat; plus de droits pour l'individu, plus de droits pour la famille, plus de droits à plus forte raison pour une société quelconque qui se formerait au sein de l'Etat, ou au-dessus de lui.
Dans la société démocratique rêvée par la Franc-Ma­çonnerie il n'y aura plus ou il ne doit plus y avoir que ces deux Unités : l'individu et l'Etat. D'un côté l'Etat omnipotent, de l'autre, l'individu impuissant, dé­sarmé, privé de toutes les libertés, puisqu'il ne peut rien sans la permission de l'Etat.

N’est-ce pas vers cela que nous marchons à grands pas? et cette conception de la société n'est-elle point l'explication, et, pour nos maçons, la justification de tout ce qui est actuellement fait ou tenté contre la liberté de l'Eglise, contre la liberté des associa­tions, contre la liberté des familles, contre la liberté individuelle elle-même? L'Etat ne peut, ne doit souf­frir aucune association autre que celle qu'il est. Si des événements passés, si des individualités puissantes ont créé au sein de la société civile des associations distinctes, l'Etat doit travailler constamment à rétré­cir le cercle dans lequel elles vivent et agissent, jusqu'à ce qu'il soit parvenu à les absorber ou à les anéantir. Selon Rousseau, selon la Maçonnerie, c'est là son droit, c'est là son devoir, droit et devoir qui décou­lent directement du contrat social, et sans l'exercice desquels ce contrat deviendrait illusoire et bientôt caduc.
Que l'on cesse donc de s'étonner que dans cette so­ciété sortie de la Révolution, pétrie de l'idée révolu­tionnaire, l'Etat veuille tout centraliser et tout absor­ber, étouffer toute initiative et paralyser toute vie : il obéit en cela à sa loi, au principe d'après lequel il doit être tout, tout lui ayant été livré par le con­trat initial. Ce qui vit, ce qui se meut, ce qui est en dehors de lui, ne l'est et ne le fait que par une usur­pation dont il doit être rendu compte pour restitu­tion.
Cette revendication doit s'exercer surtout à l'égard des associations, parce qu'elles sont plus puissantes que les individus, et surtout à l'égard des associa­tions qui ont un idéal autre que celui de l'Etat natura­liste. Le pacte social a été contracté pour une plus complète jouissance des biens de ce monde. S'il est des sociétés formées dans le but de porter ailleurs le regard de l'homme, de l'exhorter à se détacher des biens présents pour ambitionner et poursuivre, d'autres biens, ces sociétés sont la contradiction vi­vante de la société sortie du contrat social, elles doivent disparaître avant toute autre. Le devoir est de les traquer, de les mutiler jusqu'à une complet anéan­tissement. C'est là l'explication des calomnies ré­pandues par les humanistes dans leurs écrits contre les religieux, et, des persécutions sans cesse renou­velées contre eux depuis la Renaissance jusqu'à nos jours, comme aussi, de la guerre à mort déclarée aujourd'hui à la première des sociétés religieuses, à celle qui est le fondement et le principe de vie de toutes les autres, à l'Eglise catholique.
On constate actuellement un mouvement de réac­tion contre l'état social institué en France par la Révolution. On institue partout des syndicats, on re­tourne aux corporations. Puisse ce mouvement aboutir à la restauration de la société dans son état normal ! Dans la société normalement organisée, il y a entre l'individu et l'Etat des sociétés intermédiaires qui en­cadrent les individus et qui par leur action naturelle maintiennent l'Etat dans le domaine qui lui appar­tient et l'empêchent d'en sortir. Ces sociétés se nom­ment : familles, corporations, communes, provinces, Eglises. Que, dans ce régime, le plus faible des individus soit lésé par l'Etat ou par tout autre, aussi­tôt c'est son association, c'est toute une collecti­vité organisée qui se lève pour le défendre. Par elle, il est fort; et parce qu'il est fort, il est libre.
La démocratie, c'est l'esclavage.


1. J.-J. Rousseau n'est point, à proprement parler, l'in­venteur du contrat social. C'est un protestant, Hubert Languet, qui, dans le Vindiciai contra tyrannos, sous le pseudonyme de Junius Brutus, exposa pour la première fois la théorie d'un « contrat », origine de la société.
Il est aussi absurde de supposer un. pacte primitif fondamental de la société publique, qu'il serait absurde de supposer un pacte constitutif de la famille entre le père et les enfants. Bonald dénonce le cercle vicieux où tombe Rousseau : « Une loi, ne fût-ce que celle qui réglerait les formes à suivre pour faire la loi; un homme, ne fût-ce que celui qui l'aurait proposée, aurait toujours précédé cette prétendue institution du pouvoir, et le peuple aurait obéi avant de se donner un maître ». Bossuet avait dit avant de Bonald : « Bien loin que le peuple en cet état (sans loi et sans pouvoir) pût faire un souverain, il n'y aurait même pas de peuple ».


2. Contrat social, livre I, ch. VI.

10.5.08

LE PEUPLE EST AUTRE CHOSE QUE LA DEMOCRATIE

Démocratie… Jamais peut-être autant qu’aujourd’hui il n’a importé que ce mot fût défini pour qu’on n’en jouât plus.
M. Frossard atteste les poètes et les philosophes. C’est beaucoup et c’est peu. M. Paul-Albert Robert, professeur honoraire à la Faculté libre de droit de Marseille, a écrit, dans une lettre au Temps, lettre pleine d’excellents arguments contre le régime électif, cette opinion très personnelle, que l’Eglise a su « réussir pleinement la solution de ce délicat problème : faire surgir l’autorité suprême de la démocratie… » Voyons, pourquoi ne pas être exact ? Ce qui surgit d’autorité dans l’Eglise ne vient pas de la démocratie, puisque cela ne sort nullement d’un peuple-roi mais d’un peuple tout court, et d’un peuple d’ailleurs gouverné. Pourquoi confondre les deux termes ? L’un dit : gouvernement du peuple. L’autre dit : condition populaire. Si le peuple catholique régnait, s’il s’agissait à son propos d’une démocratie véritable, le problème serait résolu sans effort (mais au pire sens) et l’autorité (mal constituée, mais constituée) n’aurait pas à « surgir » d’un jeu complexe et alternant de désignation par en haut et d’élection exercée sur un plan déjà patricien.
La démocratie n’est pas le peuple, c’est le gouvernement d’un peuple dont les membres sont comptés un par un : un homme, un vote, cet homme et ce vote étant réputés souverains et créateurs d’une souveraineté soit directe soit déléguée. On sait quel mal cette institution a fait à la Belgique après la victoire de 1918 : on y avait précédemment le vote plural ; le vote plural peut, dans son ensemble, être démophile, ami et bienfaiteur du peuple, son sauveur, son conservateur : il n’est pas démocrate, puisqu’il institue une autorité fondée non sur la quantité, mais sur la qualité, celle de chef de famille, d’époux, de père, de diplômé, de possédant, etc… Les qualités prévalent sur le nombre. En démocratie, le Nombre, par définition, ignore la Qualité, et la façon dont il prévaut sur elle ne naît pas d’une corruption, ni d’une crise, ni d’un abus : il est lié à la logique de son pouvoir.
Dans sa lettre, M. Paul-Albert Robert proteste contre la brigue. Et il a raison. Les beaux temps de la République romaine, patriciens dans l’âme, avaient la brigue en horreur. L’élection vraie, l’élection juste est celle qui n’est pas sollicitée qui jaillit comme un cri public vers le mérite ou la compétence : Ambroise évêque ! Ambroise évêque ! Ce n’est donc pas l’élection démocratique. Celle-ci, non contente de tolérer la brigue, en fait un devoir et une loi : notre scandaleux système de « déclaration de candidature », établit après le Boulangisme, interdit aux électeur d’aller spontanément, librement, naturellement, à l’homme de la circonscription qu’ils savent apte à les servir ; il faut que celui-ci soit allé dire à Monsieur le Préfet : je suis candidat. Quelle honte ! Mais quel aveu ! La démocratie bénéficie de l’ambition des candidats comme de la compétition des partis. Elle vit de cela, et de cela seul.
Certains auteurs, et des plus grands, entre les Maîtres de jadis, ont paru se montrer moins radicalement hostiles à la démocratie. L’autorité d’Athènes, dont l’histoire ne laisse pas d’être cruellement exemplaire, semble avoir fait hésiter un Aristote si rigoureux d’ordinaire. Il faut avouer que sa Politique n’est pas exactement le Traité de la science de la durée et de la prospérité des Etats ; il y manque, en plus d’un endroit, des distinctions indispensables. Le droit, le devoir, l’utile, le nécessaire, y semblent parfois confondus. Tels de ses disciples, comme saint Thomas d’Aquin sont bien plus nets. Non partout : son De Regimine Principum est un traité de l’action politique, c’est-à-dire d’une action qui ressortit, comme toute action, à l’éthique ; il ne traite pas de la STRUCTURE des Etats politiques. La Somme est autrement instructive à cet égard. Mais, de toute évidence Bossuet est en progrès sur Saint Thomas, comme Bonald sur Bossuet et notre La Tour du Pin sur Bonald. Sans la moindre foi au progrès, l’on est bien obligé d’avouer que des travaux persévérants conduits dans le même sens par des générations de hautes intelligences nourries des mêmes principes, dévoilent et dégagent de croissantes lumières.
Leur Père à tous, Aristote, paraît même en progrès sur lui-même quand on compare à sa Politique, défectueuse par moments, la lumineuse monographie découverte en 1890, intitulée : la Constitution d’Athènes, que d’autres traduisent : la République des Athéniens, où la matière proprement politique est distinguée par l’analyse philosophique de l’histoire, et isolée des questions latérales tirées de l’impératif moral. Bien que la déontologie médicale doive se mettre en règle avec le décalogue, il ne faut pas mêler les affaires d’éthique à des affaires d’anatomie. Ce petit livre inestimable, bienfait posthume d’Aristote à ses arrière-neveux, mériterait d’être lu et médité par les esprits que préoccupe le problème de la démocratie. Il fut l’objet d’un cours à l’Institut d’Action française de 1906, dans une chaire dite de l’Empirisme organisateur : c’est un des plus beaux souvenirs de notre jeunesse, alors expirante, et quels amis n’y voyons-nous pas assis sur le même banc,- de Lucien Moreau et de Jacques Bainville à Léon de Montesquiou, à Robert de Boisfleury, à Pierre Gilbert !
Il faudrait donc que cela serve. Répétons que la démocratie est la grande créatrice, excitatrice et stimulatrice de ce mouvement collectif, dénommé la lutte des classes. Je ne comprends pas comment M. Frossard peut opposer à cette évidence les réflexions marxistes sur « le patricien et le plébéien de l’ancienne Rome ». Car elles la confirment.
Très précisément, les conflits sociaux gréco-romains, les longues guerres des pauvres contre les riches, et la destruction de la Cité et de la Ville sont sortis de la démocratie. Avant elle, la coopération des classes se faisait tant bien que mal. Après elle, de cette démocratie politique et de son parti sortit l’institution canonique de leurs rivalités d’intérêt. Celles-ci auraient pu exister, mais elles auraient pu aussi ne pas exister, suivant le cas, les circonstances, les évènements… La démocratie les a rendues nécessaires.
Cela de tous temps. Il y eut des heures où les ouvriers du cuir de Limoge ont voulu obtenir des patrons du cuir un salaire supérieur ; il sonna d’autres heures où les mêmes ouvriers et les mêmes patrons, menacés par des industriels tchécoslovaques, ont fondé, toujours à Limoges, une entente sur le commun intérêt de leur travail, bien supérieur aux antagonismes de leurs classes. Cette union est naturelle dans un pays non démocratique. Elle est particulièrement difficile quand un pays comme le nôtre ou comme Rome décadente, est doté du régime politique du Nombre et de son vote : les partis naissants cherchent et trouvent dans les classes rivales ce qu’on peut appeler l’eau mère de leur cristal. Ce qui était accidentel, et fortuit, l’antagonisme social, devient régulier et constant, en vertu de la structure légale de la cité. C’est d’elle, en conséquence, que le mal vient ou, si l’on veut, qu’il devient mal chronique et constitutionnel. Un socialisme sans démocratie peut aboutir à une organisation nationale et sociale du travail. Le socialisme démocratique va, court, se précipite à la lutte des classes prolongée jusqu’à leur ruine. Comme la démocratie produit dans l’Etat absolument les mêmes effets que dans la société, elle est bien le mal et la mort. Une République peut être en règle avec les lois de la durée et de la prospérité des peuples, une Démocratie jamais.
On a vu de grandes Républiques durer et croître du moment qu’elles étaient en conformité avec les conditions héréditaires de la vie des Etats : leurs pouvoirs collectifs ont été longtemps productif et florissant. Cela ne s’est vu d’aucune Démocratie. Tous leurs débuts ont coïncidés avec la consommation et la dissipation des ressources, la dégradation et l’exagération de l’autorité, l’affaiblissement de l’Etat, et les empiètements de l’Etatisme, avec la centralisation en même temps que la décomposition. Les peuples les mieux doués, les pays les plus favorisés, ont tous reçu de la démocratie le même souffle de décadence qu’elle a répandu chez nous entre 1789 et 1939 : il y a le même siècle et demi de cette course à la mort chez le peuple d’Athènes, entre 490, l’année de Marathon, et 338, l’année de Chéronée ; encore, la guerre du Péloponnèse, qui accéléra ce déclin, était de 431 : plus près de la grande victoire que de la défaite définitive.
Encore cette démocratie était-elle tempérée par toute sorte de rudes défenses : esclavage, métèques, tirage au sort des archontes (et non leur élection comme on faisait des stratèges) et le fameux : « Qui est ton père ? Qui est ta mère ? Et le père de ton père ? » La flamme du verbalisme démocratique fut la plus forte que tout et plus destructive. En fait, rien n’a jamais tenu contre cette puissance de mort.
Le Play disait : « La monarchie dans l’Etat, l’Aristocratie dans la Province, la Démocratie dans la Commune. » Erreur patente, il faut le dire avec tout le respect dû à ce maître, erreur née d’une fausse symétrie. Que vaut la démocratie dans la commune ? Nos finances municipales, nos polices municipales, nos convulsions et nos léthargies municipales répondent qu’elle n’y vaut rien, et pis que rien.
L’expérience que la France en a faite est probante. Le Play voulait sans doute dire : République dans la Commune. Mais il savait fort bien que, heureusement pour elles, un grand nombre de petites communes, ayant pour maire un propriétaire terrien, parfois châtelain, sont de menues seigneuries constitutionnelles, qui ne connaissent même pas un statut républicain. Pour les grandes agglomérations, ce sont, ce doivent être des Aristocraties comme les Provinces, mais d’un caractère spécial : la bourgeoisie y est moins différenciée que dans les capitales de provinces, les grandes fortunes y sont moins personnelles, et cette réunion de foyers se rapproche davantage du type communautaire, le nom le dit assez bien, avec son prolongement non moins significatif de biens communaux. La Tour du Pin disait avec raison que la commune est la famille de ceux qui n’en ont pas, il entendait une grande famille au sens historique. Rien de démocratique dans cette commune-là ! Car lorsque la démocratie s’y introduit, avec le souverain suffrage égal et unitaire, on peut dire que ce bon fruit reçoit le ver qui le rongera.
Il me semble difficile de résister à ce corps d’évidences, qu’il serait possible de rendre plus clair encore.
Quant aux censures que les marxistes faisaient de la démocratie, M. Frossard en aurait-il été dupe lui aussi ? Je l’avoue : ce fut mon cas. Il y a fort longtemps et pour un temps très court.
Quelques conversations et quelques lectures de socialisme orthodoxe suffirent à me montrer que, si les Partis et les Classes y étaient hautement préférés aux « grues » métaphysiques dont parlait Paul Lafargue, le gendre de Marx, on n’en considérait pas moins le jeu naturel de la Démocratie comme le grand ressort de la lutte sociale et le meilleur engin qui pût servir aux camarades et aux militants. Preuve : le merveilleux emploi, de plus en plus socialiste, fait des scrutins démocratiques, depuis le retour des communards amnistiés (1880) jusqu’aux élections du front populaire (1936). Et cela se comprend : tout organisateur qu’il se prétende, le socialisme ne veut organiser le travail qu’au profit de l’égalité ; le socialisme marxiste est à fins égalitaires ; il tend à la démocratie politique. Qu’est-ce, au surplus, que l’égalité politique sans égalité sociale ? Une simple fiction. Les deux systèmes se soutiennent partout et ne peuvent se contredire sérieusement nulle part. On n’épurera le socialisme, on ne lui rendra une valeur naturelle et humaine qu’à la condition de le délivrer de toute politique démocratique. Alors, et alors seulement, cet égalitarisme extérieur ayant disparu, on pourra substituer à son égalitarisme intrinsèque les principes d’entr’aide et d’interdépendance qui sont la condition de la vie et des progrès de toute nation.
Le seul mot de démocratie crée un péril pour l’ordre et la paix. A l’exemple de Le Play qui, pourtant fort attentif au vocabulaire, voulut faire dire à ce mot ce qu’il ne dit point, La Tour du Pin eut, un jour, une courte hésitation, il inclina même à cet usage malsain. Armée de son merveilleux petit livre, Aphorismes de sciences sociales, notre jeunesse osa le rappeler à ses propres principes. Il eut la bonté généreuse de s’y rendre comme à la vérité. Pourquoi nos conservateurs et nos nationaux n’ont-ils pas fait comme lui ? Cette joie, ces hautes délices, cette béatitude d’être dans le vrai les auraient certainement consolés du plaisir qu’ils nous auraient fait.
M. Paul-Albert Robert invoque le prestige de l’histoire ecclésiastique en faveur de ce qu’il appelle « démocratique » et qui n’est point démocratique. Est-ce que ces vagues ressemblances, ces reflets approchés de la démocratie, n’ont pas été trop souvent capables d’imposer ou inspirer des déviations dangereuses ?
Comment peut-il bien comparer une grande société d’âmes comme l’Eglise, à nos sociétés charnelles ? Celles-ci ne sont point filles de notre volonté. Elles sortent de notre sang, de notre naissance : natio, le mot le dit. Alors, pourquoi éliminer, par suite d’on ne sait quelle timidité instinctive, le procédé naturel de la transmission du commandement, qui est l’hérédité physique, le même qui sert à transmettre les autres biens ? L’histoire est le panégyrique vivant des monarchies héréditaires, en particulier dans notre France. Quelle phobie en peut éloigner ? Et nos cent cinquante-deux années de démocratie parlementaire ou plébiscitaire sont-elles si brillantes qu’il faille se dire les uns aux autres : Comme on est bien là ! Et comme il fait bon d’y rester !
Tiré de « De la colère à la justice – réflexions sur un désastre »
De Charles Maurras
1942

15.2.08

Réflexions sur la montée de l'islam en France.

Les médias français ont délibérément jeté le voile sur un point brûlant de l’actualité : le financement des constructions de mosquées et l’essor des lieux de cultes musulmans. Ils sont actuellement recensés au nombre de 1535.

C’est ainsi que l’actuel locataire de l’Elysée se veut le garant absolu de l’émancipation et de l’édification sur notre sol d’un islam de France, jusqu’à ce qu’une véritable institutionnalisation s’en suive.

L’ex-ministre de l’intérieur a donc réaffirmé sa volonté de relancer le débat à ce propos. C’est le 1er octobre dernier, devant la tribune de la fondation du conseil français du culte musulman à la grande mosquée de Paris, qu’il évoque clairement son intention de financer les constructions et d’assurer l’essor des lieux de culte déjà existants, avec toute la structure que cela implique : édifications de mosquées « cathédrales » ou nouveaux endroits de prières, formation de ministres du culte (imams), filières d’enseignement coranique, bibliothèques attenantes, divers pôles éducatifs et commerciaux (librairies, barbiers, épiceries…) etc. :

Il déclare : « Après l’heure de la construction, voici l’heure de la consolidation », et,

« la fondation pour les œuvres de l’islam de France, qui a pour objectif de financer les lieux de culte à la mesure du respect que doit inspirer une grande religion » ou encore,

« l’islam est une composante intime de notre pays » et « c’est aussi une partie de la France ».(allocution reprise sur le site internet de l’Elysée).

Tels sont les propos d’un promoteur du multiculturisme, qui échangerait bien églises contre mosquées. Mais à quel prix ?!

Pour se porter officiellement sponsor au développement de l’islam en France, en récupérer le fruit, et nous les pépins, l’état propose un « toilettage » de la loi de 1905, sur la séparation de l’église et de l’état (dont les authentiques nationaux que nous sommes sont bien entendu fermement opposés), alors que dans l’article 2, « la république ne reconnaît, ni ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ».

Cheval de bataille discret et sournois des instances politiques, et sous prétexte d’éviter l’implication financière de certains états fondamentalistes du monde arabe, la réforme de la loi (initiée dans le rapport Machelon) permettrait de considérer une liberté des cultes et des religions sans distinction, donnant à l’état l’assurance légale d’une participation démesurée aux investissements et justifiant le financement de multiples projets, coûteux de plusieurs millions d’euros. Puisque ce n’est pas avec quelques pièces dans la corbeille ça et là, que s’érigeront ces gros chantiers.

C’est dans l’optique de faire passer la pilule, que le nain le l’Elysée déclarait : « Pour lutter contre l’intégrisme et le communautarisme, il faut que toutes celles et ceux qui ont la foi, puissent la vivre et la pratiquer en toute égalité ». (Quotidien La Croix du 21 septembre 2007).

Sachez qu’en région parisienne :

- à Montigny-lès-Cormeilles, sera inauguré prochainement un minaret de 700 m2 avec salle de conférence, salon de thé, pour un montant de 800000 euros, (le parisien),

- à Créteil, un coût total de 4 millions d’euros pour un future lieu de prières,

- pour la mairie communiste de Sevran, une future mosquée géante à capacité d’accueil de 5000 personnes verra le jour pour une bagatelle de 5 millions d’euros.

Les mosquées devraient se développer fortement dans le quart sud-est avec :

- à Annecy, la démolition puis la reconstruction d’une grande mosquée moyennant un coût de 3.6 millions d’euros sur un terrain vendu pour un euro symbolique. Le fisc de la ville prévoit même pour les fidèles ou les tiers sympathisants du culte une réduction d’impôt de deux tiers sur le somme donnée pour sa construction, manière habile de contourner la loi et de financer indirectement les travaux,

- à Grenoble, pas moins de 3 projets sont en cours,

- 5 millions d’euros pour la commune de Grigny avec en prime le terrain offert par la municipalité,

- à Givorss en région lyonnaise, 1.5 millions d’euros sont nécessaires à la réalisation d’une mosquée de 1200 m2. Il est intéressant de noter qu’en juillet dernier, la communauté locale ne disposait que du tiers de la somme demandée pour une édification débutant 2 mois plus tard,

- à Marseille, un loyer annuel de 300 euros seulement est « exigé » pour un terrain pratiquement d’un hectare ! (observatoire de l’islamisation).

Entendons bien qu’il s’agit là d’une liste non exhaustive, et que partout en France des cas similaires abondent.

Dans certaines grandes villes de France, les tribunaux administratifs saisis par des organisations luttant contre l’islamisation de la France, ont retardé l’échéance de ces chantiers. En effet dans la majeure partie des cas, la municipalité ou les pouvoirs locaux, donnaient, ou sous-louaient à des prix en deçà des indices du marché de l’immobilier. En 2004 à Tours, pour la trop grande modestie du prix de vente d’un terrain, la municipalité a été condamnée, et la délibération du conseil municipal annulée par un jugement de tribunal administratif. Car l’article L1311.2 du code des communes de la loi n° 1094 du 29 août 2002, n’évoque aucunement une redevance modeste, et dit que la finalité des baux emphytéotiques* est l’accomplissement d’une mission de service public, visant donc la population toute entière, alors qu’une mosquée ne présente qu’un intérêt particulier au seul profit des musulmans.

Tout ceci bien avant que soit décidé une refonte de la loi de laïcité.

Cet exemple illustre bien la situation actuelle. Pour subventionner l’islam, le gouvernement n’hésite pas à violer et détourner la loi de décembre 1905 par des biais législatifs abusifs appliqués par l’exécutif local.

Outre l’appui direct de la république, usant donc de fonds publics, la communauté musulmane (6 millions d’individus selon les chiffres officiels, soit 10% de la population), se voit financer leurs édifices par des tiers étrangers ainsi que par des pays tels que l’Arabie Saoudite, le Maroc, la Turquie… La ligue islamiste mondiale, organisation créditée par l’Arabie Saoudite, a par exemple contribué à la construction de la mosquée d’Evry, et le Roi Fahd à celle de Lyon. Ceux là même qui interdisent l’existence de communautés chrétiennes et par conséquent la construction d’églises sur leur sol.

Le budget déguisé et accordé aux musulmans est sans commune mesure avec celui accordé pour la rénovation des églises.

L’ex ministre de l’intérieur ne cache pas son animosité vis-à-vis du catholicisme : « entretenir une église où se réunissent trois paroissiens une fois tous les mois c’est poursuivre une chimère » et « qu’une église soit transformée en une salle communale, où est le problème ? ».

Alors monsieur Sarközy, animosité passagère ou résurgence d’une christianophobie liée à vos véritables origines ?

A cause du manque de financement des projets de rénovations du patrimoine chrétien en France, 45000 églises et 95 cathédrales se dégradent chaque jour. Il est logique que dans un avenir proche la république prétendument laïque escompte détruire 2800 édifices ruraux.

Quel est le véritable but recherché par nos dirigeants ? Terminer le travail commencé au XVIIIème siècle par leurs « aînés dans la foi », détruire la vraie religion !

Certains catholiques se moquent et fustigent le combat contre l’immigration prétextant la hiérarchie des priorités ! Ils oublient bien souvent que le génocide ethnique par substitution engagé au cours du siècle dernier, entraîne de manière définitive la destruction de la spiritualité traditionnelle et du patrimoine français.

- Dimitri -

* Le bail emphytéotique se définit comme un droit réel de jouissance du bien d’autrui, accordé pour une longue durée allant de 18 à 99 ans, moyennant paiement d’une redevance modique.

16.1.08

L'Eglise et l'Etat

Dieu, dans son infinie sagesse, a placé le chrétien sous l’autorité de deux sociétés parfaites : l’Eglise et l’Etat. Chacune est établie sur un plan différent : le plan spirituel pour la première, le plan temporel pour le dernier. Leurs domaines d’influence respectifs sont définies par Notre Seigneur dans l’Evangile par la phrase « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Toutefois cette distinction du temporel et du spirituel que Jésus-Christ déclare est plus difficile à appréhender que la simple séparation prônée par l’hérésie laïciste. Saint Thomas d’Aquin a expliqué lumineusement les subtilités de cette distinction, dans trois principes fondamentaux.






Le premier de ces principes s’énonce ainsi : « le droit divin qui vient de la grâce ne détruit pas le droit humain qui vient de la raison naturelle ». Le droit divin régit les relations des hommes avec Dieu, et concerne donc seulement l’Eglise. La raison naturelle est ce qui découle de l’ordre créé par Dieu, c’est la loi qui gouverne la société des hommes, à savoir l’Etat. Ce premier principe explique donc que la loi de Dieu et la loi des hommes ne peuvent être contradictoires, puisque les deux émanent de Dieu. On peut essayer de comprendre ce premier principe sur une échelle plus réduite en le reformulant : ce qu’il est juste de faire pour Dieu ne peut être en contradiction avec ce qu’il est juste de faire pour son prochain. De ce premier principe on déduit :


- la distinction entre les pouvoirs de l’Eglise et ceux de l’Etat.


- l’harmonie entre ces deux sociétés.



Le deuxième principe réside en la distinction des domaines temporel et spirituel. Jésus déclare à Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde ». De fait, l’Eglise est fondée libre de toute domination temporelle. Elle n’est dépendante d’aucune race, aucune nation, aucun régime. En effet, au premier siècle, toute religion était essentiellement nationale, et on ne distinguait pas la morale et le social. Les Juifs, par exemple, furent incapables d’accepter le Christianisme, car ils attendaient un messie qui eût instauré la domination universelle de leur peuple. A l'inverse, l’Eglise souhaite étendre le règne du Christ sur tous les peuples. Au cours de l’histoire, tout schisme mena les dissidents sous la coupe d’un régime : qu’on pense au grand schisme d’Occident, à l’anglicanisme… L’Eglise Catholique est la seule à créer la distinction et à maintenir l’équilibre entre temporel et spirituel.



Il résulte de ce deuxième principe que l’Eglise est souveraine en tout ce qui est spirituel, c'est-à-dire en tout ce qui a trait au bien commun surnaturel. Complémentairement, l’Etat est souverain en tout ce qui est temporel, c'est-à-dire en tout ce qui a trait au bien commun naturel.




La lacune laissée par les deux premiers principes est la question des domaines où temporel et spirituel sont mêlés, par exemple en morale sociale. Le troisième principe y répond : « La société civile est subordonnée à l’Eglise ». L’Eglise est donc souveraine en tout ce qui concerne directement le salut spirituel du genre humain. Elle est également souveraine, indirectement, en tout ce qui concerne indirectement le salut du genre humain. L’Eglise peut condamner un Etat ou un chef d’Etat dont les décisions publiques seraient immorales, et annuler son pouvoir sur les citoyens.

9.11.07

PRINCIPE DE SUBSIDIARITE ET DECENTRALISATION

La société est une réunion d'hommes qui agissent ensemble en vue du Bien Commun. La toute première des sociétés est la famille. Cependant, elle ne se suffit pas à elle même pour assurer sa perfection et son bonheur.

De cette insuffisance de la famille à pourvoir aux besoins de ses membres émerge naturellement une union organique des cellules familiales sur le plan local (communes, provinces) ou de certains membres de la famille sur le plan économique (associations professionnelles). C'est pourquoi, on peut parler d'une conception organique de la société dans laquelle des entités de différentes tailles et de différentes importances contribuent à un bien commun auquel participe chacun des ses membres.

Ces entités intermédiaires manquent d'une certaine perfection car elles ne sont que des moyens pour la cellule de base et qu'elles ont besoin d'un principe directeur au dessus d'elles. Ce dernier est constitué par l'État garant de tous ses membres (la Nation) et de leur héritage (la Patrie). Contentons nous de citer Aristote: « La société qui s'est formée de la réunion de plusieurs villages constitue la cité qui a la faculté de se suffire à elle même, étant organisée non seulement pour conserver l'existence, mais encore pour procurer le bien être. Cette société est donc elle aussi dans le vœu de la nature, comme toutes les choses qui en sont les éléments (...) Se suffire à soi-même est un but auquel tend toute production de la nature, et cet État est aussi le plus parfait. Il est donc évident que l'homme est naturellement fait pour la société politique ».

Notre conception de la société s'oppose donc à la vision individualiste ou collectiviste de l'État Nation. Ces dernières nient les communautés naturelles au motif qu'elles entraveraient La Liberté de l'Homme.

Ni libéraux, ni socialistes, nous pensons que l'organisation administrative de l'État doit favoriser un étagement des pouvoirs et des sources d'autorité pour que les décisions soient prises au plus près des réalités et des besoins des hommes.

La décentralisation, reposant sur la coexistence d'une autorité centrale et d'une pluralité d'autorités locales autonomes, nous semble aller dans le bon sens. Bien menée, elle semble obéir au principe de subsidiarité et maximiser le nombre de corps intermédiaires. Le principe de subsidiarité est pour nous une règle maîtresse de l'organisation sociale. A savoir : « de même qu'on ne peut enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté les contributions dont ils sont capables de s'acquitter de leur propre initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d'une manière dommageable l'ordre social que de retirer aux groupements d'ordre inférieur pour les confier à une collectivité plus vaste les fonctions qu'ils sont en mesure de remplir eux même » (Pie XI). En application de ce principe, les corps, emboîtés les uns dans les autres, sont complémentaires. Chacun possède la compétence pour gérer les problèmes qu'il connaît et il a l'autorité pour le faire.

Certes le mondialisme veut faire sauter le verrou de la nation. La question qui se pose est de savoir si l'on défendra mieux la nation en refusant de décentraliser qu'en l'acceptant. Pour défendre la nation, on ne peut pas ne pas vouloir le développement de ses forces vives. Or les forces vives et réelles d'une nation sont essentiellement au plan économique, les entreprises et les métiers, et au plan régional, les communes et les régions.

Redonner des forces vives à la nation implique donc une réhabilitation du régionalisme, non pas en tant que ferment de division mais précisément parce qu'une nation a besoin d'assises stables. Les mouvements séparatistes ne sont souvent que les conséquences du centralisme jacobin et de la tyrannie des technocrates parisiens. Le respect de l'identité locale et provinciale, loin de détruire le sentiment national, le renforcera car c'est de l'enracinement sur le sol natal que naît l'amour de la Patrie. L'identité régionale est constitutive de l'identité nationale. L'Etat doit donc respecter le principe de subsidiarité. C'est aux corps intermédiaires à rythmer la vie de la nation, l'Etat ne devant intervenir qu'en cas de dysfonctionnement des sphères inférieures. Il est responsable du Bien Commun national (justice, défense nationale, paix intérieure).

Nous sommes actuellement dans une civilisation industrielle dominée par l'Etat moderne planificateur, jacobin, centralisateur et totalitaire, axé sur une économie de producteur dépourvue de finalité. Mais une société ne peut survivre que si elle est intérieurement innervée par ces noyaux diffuseurs de vie que sont les communautés naturelles. En effet, il est impossible de gouverner une société moderne, sans disposer d'interlocuteurs au sein de la société civile et du monde socioprofessionnel.

28.10.07

A PROPOS DE L'EGALITE ET DU PROBLEME DES CLASSES

C'est un fait : jamais peut-être, d'une classe à l'autre de la société ou entre hommes de niveau culturel différent, on n'avait observé tant de dis­tance et si peu d'échanges. L'influence humaine, positive des élites sur le peuple est maintenant voisine du néant. On avait cru pourtant — et ce fut un des mythes majeurs du XIXe siècle — que la fraternité, la communion symphonique des hommes naîtrait du relâchement de l'esprit de classe et, à la limite, de la suppression des bar­rières sociales. Mais ce qui arrive n'est paradoxal qu'en apparence. La confusion n'unit pas, elle sépare : elle crée entre les éléments confondus des oppositions irréductibles. Toute réciprocité d'in­fluence implique une solide diversité de nature et de position. C'est dans les sociétés fortement diver­sifiées et hiérarchisées, où le passage d'un étage à l'autre est très difficile, voire impossible, que s'éta­blissent, entre les membres de ces hiérarchies, les échanges les plus féconds et les plus durables : qu'on songe à l'influence séculaire de la monarchie, de la noblesse ou des castes sacerdotales sur le peuple... Dans de telles formations politiques, cha­cun, en raison même de la stabilité, de la « fata­lité » de sa situation, est entièrement disponible pour travailler au bien de l'ensemble. Les classes d'en haut ont les mains libres pour donner et celles d'en bas pour recevoir, et les échanges sont d'au­tant plus profonds que le fossé entre les divers milieux sociaux est plus difficile à franchir.

La mystique démocratique a gâté tout cela. Comment de vrais échanges pourraient-ils subsister à l'intérieur de la hiérarchie quand l'existence même de cette hiérarchie est mise en question ? Là, l'inférieur, dégoûté de son milieu, de sa posi­tion, de lui-même par cet appel d'air malfaisant que crée en lui l'enseignement de l'égalité, n'a plus rien à recevoir du supérieur, il ne vise qu'à s'égaler à lui et à l'expulser. Et le supérieur à son tour, au lieu de gouverner pour le bien de tous, tend seule­ment à défendre sa position menacée. L'envie d'une part, la crainte de l'autre, tarissent tous les échanges vitaux : ceux-ci ne sont possibles que dans des sociétés où le destin des individus est lié étroite­ment à la position qu'ils occupent, où le passage d'un étage à l'autre de la hiérarchie exige une trans­formation, une ascension totales de celui qui s'élève, au lieu d'être livré aux hasards grotesques de la finance ou du suffrage universel. L'échange social n'est pur et fécond que dans un monde où le diri­geant se sent en sécurité en haut parce que le subordonné se sent à sa place en bas. Mais s'agit-il encore d'échanges aujourd'hui ? Il s'agit, en haut, de défendre et, en bas, de conquérir. Avec la stérile confusion des classes commence la stérile lutte des classes.

Ce n'est pas un paradoxe d'affirmer que les bar­rières sociales favorisent très souvent la commu­nion humaine. Au début du siècle dernier, dans nos villages provençaux non encore travaillés par la fièvre républicaine, une extrême familiarité régnait entre le seigneur du lieu et les paysans : on jouait aux boules ensemble après les vêpres, les demoi­selles nobles dansaient avec les jeunes gens du village, etc. De tels courants de sympathie effective n'étaient possibles que dans la mesure où chaque classe restait liée à sa position, en dehors de toute contestation et de toute envie. Dans ces milieux, où les différences sociales étaient acceptées et vécues comme d'indiscutables nécessités, la fami­liarité pouvait grandir, d'une classe à l'autre, sans danger de promiscuité : une fraternité -profonde naissait de l'acceptation de l'inégalité.
Le messianisme égalitaire engendre au contraire, dans le peuple, la révolte et la méfiance à l'égard des chefs, chez les chefs, le souci de garder la dis­tance à l'égard du peuple : d'une part un réflexe d'agression et de l'autre un réflexe de défense, la guerre au lieu de la communion. Car — quelle que soit l'habitude que la Révolution française nous ait donnée de voir accouplés ces deux mots — la fraternité n'a pas ici-bas de pire ennemi que l'égalité.

***

Un noble de l'ancien régime pouvait, sans cesser d'être respecté et obéi, traiter ses serviteurs avec une extrême familiarité ; un parvenu moderne est obligé de compenser, par un autoritarisme mort, l'absence d'autorité vivante et de marquer d'au­tant plus ses distances qu'elles n'existent pas en réalité. L'égalitarisme le plus malsain devient fatal dès que la hiérarchie sociale n'est plus fondée que sur des différences de fortune. Pour que le peuple respecte et suive spontanément ceux qui le gou­vernent, il faut qu'il sente que ces derniers le domi­nent par autre chose que par l'argent. D'où la nécessité de diminuer entre les hommes les écarts de fortune au profit des différences de caste, de tradition, de culture, etc., ou, tout au moins, d'as­seoir les différences de fortune sur des différences humaines. Mais quelle hideuse caste de maîtres que cette populace dorée ! Elle suscite, dans l'âme du peuple, l'envie la plus noire et la plus légitime, ce « pourquoi pas moi » qui, jouant à faux, disloque les sociétés. Tout le monde en effet peut aspirer à être riche, car la conquête de l'argent est liée aux hasards les plus creux : on n'aspire pas de la même façon aux ascensions qui nécessitent un change­ment profond de mœurs ou de culture, qui entrai rient des responsabilités accrues et dont l'échec est fatalement sanctionné — moralement et matériel­lement — à brève échéance. Il n'est pas de meilleur frein à l'envie et à la révolte des masses que la présence d'une élite dirigeante dont l'autorité soit largement indépendante de l'argent.
Cette puissance (celle qui sort d'une tradition héréditaire ou du mérite professionnel) est orga­nique, spécifiée, localisée ; elle se déploie à l'inté­rieur de certains cadres vitaux, elle est féconde en vertu de sa fonction proprement humaine, de son adaptation à telles nécessités, à tels temps et à tels lieux ; elle est défendue contre ses propres abus et sa propre dégénérescence par un rythme d'échanges continus avec le milieu où elle vit, elle ne peut rien détruire qu'en se détruisant elle-même : ses intérêts se confondent avec ses devoirs.
La ploutocratie, au contraire, est inorganique, elle n'a pas de milieu spécifique (un riche est riche partout) ; étrangère à l'ordre vivant de la cité, elle ne peut être (et cela sans frein, sans correctif) qu'un facteur de désordre et de parasitisme.

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Un système de cloisons étanches entre les castes n'est ni souhaitable ni réalisable dans notre monde occidental et chrétien. Il faut que le passage soit possible du peuple à l'élite (sinon celle-ci s'épuise et dégénère), mais il faut qu'il soit difficile. Il faut que s'élèvent, d'une classe, d'une caste à l'autre, des digues hautes et fermes : ainsi, celui qui fran­chira ces digues aura vraiment monté ! Le temps où règne l'élite devrait porter à son fronton cette inscription : ici, on entre en montant.

Mais la misère de l'idéal social moderne consiste précisément à raser les digues, à établir entre le peuple et l'élite un plain-pied dévastateur. D'où la vulgarisation, l'encanaillement des élites : avec la mort de la distance montante (et de la sélection qu'implique cette distance) meurt aussi l'élite. Une élite haute postée, d'accès difficile et d'accueil sévère, ennoblit l'homme du peuple qui s'élève jusqu'à elle, elle ennoblit même, par son seul rayonnement, la masse populaire tout entière. Mais aujourd'hui, populace en haut, populace en bas, comme disait Nietzsche. Par amour pour le peuple et pour les meilleures possibilités qui dorment en lui, il importe avant tout de conserver et de recréer, au-dessus de lui, un pouvoir largement indépendant de lui, une force attractive et régulatrice à la fois, capable de protéger inlassablement les réserves popu­ laires de force et de vie contre la bassesse et la cécité plébéiennes. Sinon, cette bassesse et cette cécité submergeront tout. Car le peuple porte en lui de quoi tout sauver, tout régénérer, mais aussi tout encanailler et tout détruire. Deux courants se croi­sent dans son âme : l'un tend vers la dissolution et l'anarchie, et celui-là se suffit à lui-même, l'autre est porteur d'une richesse profonde, mais incomplète et comme germinale et sans cesse obligée de faire appel, pour se réaliser, à une influence supé­rieure. Comme Barbusse, nous avons confiance « dans le gouffre du peuple », mais à condition que ce gouffre soit éclairé et fécondé du dehors, d'en haut. Cet abîme peut tout créer comme il peut tout engloutir. Et la démocratie — le terme même indique que rien n'est au-dessus du peuple, que le peuple est seul — s'est trop longtemps bornée à cultiver le côté canaille du peuple, sa tendance à l'enlisement et à l'autodestruction. Car le peuple se suffit pour tomber, mais non pour marcher.

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La suppression des cloisons étanches entre les classes est acquise aujourd'hui et l'existence même des classes est menacée. Nous n'avons ni à nous en plaindre ni à nous en réjouir : il nous importe seulement de savoir à quelles conditions une telle société peut rester saine.
Tous les hommes peuvent aspirer maintenant aux fonctions supérieures. Pour que cette possi­bilité ne crée pas dans le peuple un appel d'air corrupteur, il faudrait que les membres des classes dirigeantes aient une existence très dure, une vie où les devoirs et les sacrifices l'emportent de plus en plus sur les privilèges, de façon que l'homme du peuple sente bien qu'il n'aurait rien à gagner, du point de vue de ses intérêts matériels, à se déclasser par en haut. Ainsi seulement, ceux qui monteraient vers les fonctions supérieures monteraient par vocation et non par ambition. Un climat ascé­tique est d'autant plus nécessaire aux sommets de la hiérarchie sociale que ces sommets sont plus accessibles au peuple.

L'Église l'a toujours compris ainsi. Elle est ouverte, à tous les degrés de sa hiérarchie, aux prolétaires, mais elle impose à ceux qui aspirent aux fonctions sacerdotales, un tel changement de vie et de tels sacrifices que le simple appât des pri­vilèges et des honneurs ne suffit pas (sauf dans les périodes d'extrême décadence du clergé) à susciter beaucoup de fausses vocations. L'homme du peuple aigri contre ses humbles devoirs d'état briguera plus facilement la fonction de député que celle de moine ! Un régime de type démocratique ne peut rester sain que dans la mesure où subsiste, chez ses dirigeants, un esprit d'immolation qui s'appa­rente à celui du sacerdoce et de la chevalerie.

Au reste, le fils du peuple appelé à guider le peuple a besoin plus que le prince ou le noble, d'être séparé du peuple par son âme et par ses mœurs ; pour faire accepter au peuple son autorité, il faut qu'il supplée, par le changement profond qui s'est opéré en lui, à cet ascendant spontané que possède le fils d'une caste supérieure. L'Église, qui tire du peuple la plupart de ses prêtres, sait les revêtir d'assez de solitude et de mystère pour qu'ils puissent guider d'en haut, avec le maximum de prestige et d'influence, la classe d'où ils sont sortis. Il y a démocratie et démocratie : dans une société comme l'Église, le prolétaire sort du peuple transfiguré par la vocation de son âme, dans la plupart des démocraties modernes, il en sort défi­guré par les ambitions de son moi.

Concluons : un régime fondé sur l'égalité juri­dique entre les hommes a besoin d'être incessam­ment racheté et purifié par un accroissement sévère des inégalités morales.
GUSTAVE THIBON

La Franc-Maçonnerie

Les origines de la FM peuvent être très diverses selon les différents auteurs. Mais son réel commencement date de 1717, lors du premier convent de la Grande Loge de Londres. Elle a pris son ampleur en France en 1723, avec l'écriture de sa constitution par James Anderson, pasteur écossais et par la création du Grand Orient de France. Cette constitution a d'ailleurs été gardée depuis. Elle tire aussi son emprise de la célèbre secte des Illuminés de Bavière dans le cours du XVIII ème siècle imprégnée des idées dites des lumières.

Ses principes sont bien sûre révolutionnaires, anticléricaux, humanistes, rationalistes, ... La FM recherche la suprématie de l'homme-dieu, la libération des devoirs temporels et spirituels de l'homme et la suppression utopique des différences. Elle cherche à créer cette république universelle, qui bafoue l'existence de la nation que nous défendons dans l'Ordre Naturel, l'héritage de cette nation et l'héritage que l'Eglise a donné à l'Europe et tout particulièrement à la France.

Son fonctionnement est pyramidal; elle utilise l'art royal qui est une manipulation des hommes que l'on doit absolument comprendre afin d'avoir la possibilité de faire tomber un jour ce système. Elle est divisée en deux corps: la FM inférieure ou bleue, et la FM supérieure. La FM inférieure comprend 3 degrés: apprenti, compagnon et maître. La FM supérieure comprend 33 degrés. Il y a en général deux convents (réunion de plusieurs loges nationales) par an, où il est étudié différents problèmes sociaux, culturels, politiques et religieux. Mais son influence est omniprésente: tous les secteurs sont infiltrés. Elle veut une réelle domination de ses idées à travers le monde.

Son influence sur l'Histoire est grande surtout depuis sa plus extraordinaire oeuvre qu'est la Révolution dite française. Elle a voulu cette révolution et l'a même dirigée. Elle a oeuvré durant l'empire napoléonien et a influé directement pour la première fois sur la politique sociale en 1830. Mais c'est en 1924 que l'on peut voir la FM diriger directement la politique nationale, avec la victoire du Cartel (SFIO et parti radical socialiste) qui a donné à la FM les trois quart de la Chambre des députés. Et il existe tellement d'autres exemples dans l'histoire de France et d'Europe: première et deuxième guerres mondiales, révolution espagnole et portugaise, et bien sûre russe, ...

Il est nécessaire de savoir que la FM a été excommuniée en 1917, cette excommunication fait parti du droit canon. Elle a aussi été dénoncée par bien d'autres papes: Clément XII, Benoît XIV, Léon XIII, ... Elle va directement à l'encontre de l'Ordre Naturel et de la stabilité d'un état. Sa suppression est nécessaire pour avoir un pouvoir stable, comme ont voulu le faire tous les grands nationalistes du début du XX ème siècle.

Voilà défini un des grands maux de notre temps : le combat continuera jusqu'à la suppression de toutes perversions, et jusqu'à la victoire des vraies valeurs.

26.9.07

SIÈGE ET CONQUÊTE DE JÉRUSALEM (1099) de "histoire des croisades" de Michaud


Jérusalem, la cité des rois hébreux, des prophètes et du Christ sau­veur, la cité tant célébrée et dévastée tant de fois, présentait à l'époque de la première croisade la même étendue, la même forme, le môme aspect qu'aujourd'hui. La physionomie des lieux était la même ; alors comme aujourd'hui, le pâle olivier, le figuier, le térébinthe, formaient la rare végétation du sol de Jérusalem. La nature qui environne la cité sainte apparut aux compagnons de Godefroy telle qu'elle nous est apparue à nous-mêmes, obscurs pèlerins des derniers temps : nature austère, morne et muette. Les malédictions de l'Écriture semblent y recevoir un éternel accomplissement. Et, du reste, observons que les tristes images de ces montagnes stériles vont bien à Jérusalem : ne fallait-il pas que la nature fût morte à côté du tombeau d'un Dieu?
Indiquons d'abord le campement de l'armée chrétienne. Un terrain plat couvert d'oliviers s'étend vers le côté septentrional de Jérusalem ; c'est le seul endroit autour de la ville qui puisse se prêter à un cam­pement. Godefroy de Bouillon, Robert de Normandie et Robert de Flandre dressèrent leurs tentes sur cette esplanade, au nord-est de Jérusalem ; ils avaient devant eux la porte appelée maintenant porte de Damas, et la petite porte d'Hérode, aujourd'hui murée. Le point nord-ouest, qui faisait la porte de Bethléhem, fut occupé par Tancrède; venait ensuite le camp de Raymond de Toulouse; ses tentes couvraient les hauteurs appelées maintenant collines de Saint-Georges; l'étroit vallon de Réphraïm et une vaste et profonde piscine le sé­paraient des murs de Jérusalem. Cette position n'était pas heureuse pour servir le siège. Aussi le comte de Toulouse se détermina à porter une partie de son camp sur le mont Sion, au midi de la ville. Les vallées, ou plutôt les profonds ravins de Josaphat et de Siloé, ne permettaient ni campement ni attaque vers le côté oriental de la cité.
La garnison égyptienne, maîtresse de Jérusalem, se composait de quarante mille hommes. Vingt mille habitants avaient pris les armes. Une multitude de musulmans des bords du Jourdain, de la mer Morte et de diverses contrées voisines était venue dans la capitale de la Judée pour y chercher un abri ou pour la défendre. Les imans parcouraient les rues de Jérusalem, ranimant par leurs paroles le courage des défenseurs de l'islamisme et promettant la victoire au nom du Prophète.
Dès les premiers jours du siège, un solitaire du mont des Oliviers était venu conseiller un assaut général; les croisés, acceptant les mer­veilleuses promesses de l'ermite, décidèrent qu'on escaladerait les murailles. Malheureusement l'enthousiasme et la bravoure ne suffi­saient point pour renverser des murs et des tours; il fallait des échelles et des machines de guerre. Malgré les grosses pierres, l'huile et la poix bouillante qui tombaient sur eux, les chrétiens, réunis en bataillons serrés, attaquèrent la ville. Les Sarrasins purent admirer ce jour-là le prodigieux courage de leurs ennemis. Si les croisés avaient eu des instruments et des machines, ce premier assaut leur eût ouvert Jéru­salem. Mais le Ciel n'accomplit point les miracles promis par le soli­taire ; les croisés rentrèrent dans leur camp, après avoir laissé plusieurs de leurs compagnons tombés glorieusement sous les murs. Les chefs de l'armée songèrent alors à se procurer le bois nécessaire pour la instruction des machines; ce n'était pas chose facile dans un pays qui n'offrait qu'un sol dépouillé. Le premier bois qui servit aux travaux du siège provenait de maisons et même d'églises du voisinage démolies par les pèlerins.
Les ardeurs de l'été avaient commencé quand l'armée des Francs arriva sous les murs de la ville sainte. A l'approche des croisés, l'en­nemi avait comblé ou empoisonné les citernes. Pas une goutte d'eau N’était restée dans le lit poudreux du Cédron. La fontaine de Siloé, coulant par intervalles, ne pouvait suffire à la multitude des pèlerins: au-dessus de leur tête un ciel de feu, autour d’eux un sol desséché et des roches brûlantes. Les guerriers de la croix furent livrés à tous les tourments de la soif ; tel était ce fléau, qu’on s’apercevait à peine du manque de vivre. Une flotte génoise entrée au port de Joppé avec des provisions de toute espèce vint distraire les chrétiens de leurs sombres pensées; des vivres, des instruments de construction, un grand nombre d'ingénieurs et de charpentiers génois arrivèrent au camp de Jérusalem sous les ordres de trois cents hommes commandés par Raymond Pelet.
Le bois manquait toujours. Mais les croisés eurent connaissance d'une forêt du côté de Naplouse ; bientôt on vit arriver à la file dans le camp des chameaux chargés de sapins, de cyprès et de chênes. Tous les bras furent employés au travail; aucun pèlerin de l'armée ne restait en repos. Tandis que les uns construisaient des béliers, des catapultes, des galeries couvertes, des tours, les autres, guidés par des chrétiens du pays, s'en allaient avec des outres demander un peu d'eau à la fontaine d'Elpire, sur la route de Damas; à celle des Apôtres, un peu au delà de Béthanie; à la fontaine de Marie, dans le vallon appelé Désert de Saint-Jean; à une autre source, à l'ouest de Bethléem, où le diacre saint Philippe baptisa, dit-on, l'esclave de Gandace, reine d'Ethiopie. Parmi les machines de guerre qui s'élevaient me­naçantes, on remarquait trois énormes tours d'une structure nouvelle, chacune de ces tours avait trois étages : le premier, destiné aux ouvriers qui en dirigeraient le mouvement; le second et le troisième, aux guerriers qui devaient livrer un assaut. Ces trois forteresses roulantes s'élevaient plus haut que les murailles de la ville assiégée. On avait adapté au sommet une espèce de pont-levis qu'on pouvait abattre sur le rempart, et qui devait offrir un chemin pour pénétrer jusque dans la place. A ces puissants moyens d'attaque il fallait joindre l'enthousiasme religieux, qui déjà avait enfanté tant de prodiges dans cette croisade. Après trois jours d'un jeûne rigoureux, les croisés, dans I attitude de l'humilité la plus profonde, firent une procession autour de la sainte cité.
Les assiégés avaient élevé un grand nombre de machines vers les côtés de la ville qui paraissaient les plus menacés par les chrétiens; ils avaient laissé sans défense le côté oriental; c'est dans cette direction, en face de la porte Saint-Étienne, que Godefroy et les deux Robert transportèrent leur camp ; ce grand déplacement, pour lequel il fallut démonter pièce à pièce les tours et les diverses machines de guerre, et qui devait décider de la prise de Jérusalem, se fit dans une seule nuit, et dans une nuit du mois de juillet, c’est-à-dire dans l’espace de cinq à six heures. Le 14 juillet 1099, au lever du jour, les chefs donnèrent le signal d’une attaque générale ; toutes les forces de l’armée, toutes les machines s’ébranlèrent contre les remparts. Les trois grandes tours ou forteresses roulantes, conduites l’une par Godefroy à l’orient, l’autre par Tancrède au nord-ouest, la troisième par Raymond de Toulouse au midi, s’avancèrent vers les murailles au milieu du tumulte des armes et des cris des ouvriers et des soldats. Ce premier choc fut terrible, mais non pas décisif; douze heure, d'un combat opiniâtre ne purent fixer la victoire. Quand la nuit les fit rentrer dans leur camp, les chrétiens gémissaient de ce que Dieu ne les avait point encore jugés dignes d'entrer dans la ville sainte et d'adorer le tombeau de son Fils.
Le jour suivant ramena les mêmes combats. Les assiégés, qui avaient appris l'arrivée prochaine d'une armée égyptienne, étaient animés par l'espoir de la victoire. Le courage des guerriers de la croix avait pris une invincible énergie. Des trois points d'attaque partaient des chocs impétueux. Deux magiciennes qui, debout sur les remparts conjuraient les éléments et les puissances de l'enfer, tombèrent sous une grêle de traits et de pierres. L'assaut avait duré la moitié de la journée, et Jérusalem restait fermée aux croisés. Tout à coup on vit paraître sur le mont des Oliviers un cavalier agitant un bouclier et donnant à l'armée chrétienne lé signal pour entrer dans la ville. Cette soudaine apparition embrase les assaillants d'une ardeur nouvelle. La tour de Godefroy s'avance au milieu d'une terrible décharge de pierres, de traits, de feux grégeois, et laisse tomber son pont-levis sur la muraille. Les croisés lancent en même temps dès dards enflammés contre les machines des assiégés, contre les sacs de paille et de foin et les ballots de laine qui recouvraient les derniers murs de la ville. Le vent allume l'incendie et pousse les flammes sur les Sarrasins, qui, enveloppés de noirs tourbillons, se troublent et reculent. Godefroy, précédé des deux frères Lethalde et Engelbert de Tournay, suivi de Baudouin du Bourg, de son frère Eustache, de Raimbaud Croton, de Guicher, de Bernard de Saint-Vallier, d'Amenjeu d'Aldret, enfonce les ennemis et s'élance sur leurs traces dans Jérusalem. De leur côté, Tancrède, les deux Robert et Raymond de Toulouse ne tardèrent pas à pénétrer dans la place. Ce fut un vendredi à trois heures du soir, jour et heure du trépas du Sauveur, que les croisés entrèrent dal Jérusalem.
L'histoire a raconté avec effroi le carnage des musulmans dans la cité conquise; ce carnage dura une semaine. Soixante-dix mille Sarrasins furent immolés. La difficulté de garder un trop grand nombre de prisonniers, l'idée qu'il faudrait tôt ou tard combattre encore les musulmans qu'on renverrait de Jérusalem, furent les motifs sur lesquels s'appuya une politique barbare. Les scènes du massacre ne furent interrompues que par une fervente visite dans l’église de la Résurrection. Mystérieux contraste! Ces mêmes hommes qui venaient d’égorger dans les rues des ennemis vaincus se montraient nu-pieds, la tête découverte, poussant de pieux gémissements, versant des larmes de dévotion et d’amour. La prière et les sanglots religieux avaient tout à coup remplacé dans Jérusalem les hurlements de la rage et les cris des victimes.

19.6.07

Les Cristeros

La révolution mexicaine, qui a été menée par ces hommes de Vraie Foi, est l'oeuvre d'hommes privés de nourriture spirituelle. Elle a duré trois ans (1926-1929). Le Mexique vivait depuis quelques années le despotisme bolchévique de Madero (1910) à Calles. Ce dernier fut le chef d'état du Mexique de 1924 à 1928. Il imposa une politique anti-catholique, appuyé par le pouvoir américain franc-maçon. Les évêques corrompus crurent bon de suspendre le culte public. Face à cela, le peuple mexicain, qui était en grande partie catholique, se souleva aux cris de "Viva el Cristo Rey!" et "Viva la Virgen de Guadalupe!". Il monta une insurrection d'abord populaire et sans structure, puis de grands généraux prirent l'insurrection en main et permirent aux Cristeros, en 1929, d'occuper les trois quarts du Mexique. Ils durent endurer durant ces années les pires atrocités de ce pouvoir révolutionnaire digne d'un Che Guevarra, d'un Fidel Castro, d'un Staline, ... Les évêques, Luis y Flores et Barreto, ont remis le culte en place au moment où les Cristeros étaient sur le point de prendre le pouvoir à Mexico. Les catholiques, ayant la possibilité de recevoir à nouveau les sacrements, ont arrêté de se battre par respect des autorités religieuses.
Ce combat a entraîné des martyrs pour la foi catholique. Il est digne de présider, comme dit Hugues Kéraly, au côté des combats des phalanges de Beyrouth, des maquisards d'Angola, des Indiens du Nicaragua, ...
Nous conseillons la lecture de "La véritable histoire des Cristeros" de Hugues Kéraly et de "Apocalypse et Révolution au Mexique" de Jean Meyer.
Que ces hommes d'honneur et de courage ne soient jamais oubliés et nous montrent le chemin du martyr.












1.5.07

Prière des Francs

Dieu Tout-puissant et Éternel,
qui pour servir d’instrument à Votre divine volonté dans le monde,
et pour le triomphe et la défense de Votre Sainte Église,
avez établi l’empire des Francs,
éclairez toujours et partout leurs fils de Vos divines lumières,
afin qu’ils voient ce qu’ils doivent faire pour établir Votre règne dans le monde et que, persévérant dans la charité et dans la force,
ils réalisent ce qu’ils auront vu devoir faire.
Par Notre-Seigneur Jésus-Christ vrai Roi de France.
Amen.

Saint Michel Archange,
ange gardien de la France,
nous nous confions à Vous.

30.4.07

PRIERE DES CHEVALIERS

Seigneur Jésus,
De qui descend toute noblesse et toute chevalerie,
Apprenez-nous à servir noblement ;
Que notre fait ne soit point parade ni littérature,
Mais loyal ministère et sacrifice coûteux.
Tenez nos âmes hautes, tout près de Vous,
Dans le dédain des marchandages,
Des calculs et des dévouements à bon marché.
Car nous voulons gagner notre paradis
Non pas en commerçants,
Mais à la pointe de notre épée,
Laquelle se termine en croix, et ce n’est pas pour rien.
Nous avons fait de beaux rêves pour Votre amour ;
Dans l’obscurité des journées banales,
Préparez-nous aux grandes choses par la fidélité aux petites
Et enseignez-nous que la plus fière épopée
Est de conquérir notre âme et de devenir des Saints.
Nous n’avons pas visé moins haut, Seigneur,
Et nous sommes bien ambitieux,
Mais heureusement nous sommes faibles
Et cette grâce, nous l’espérons de votre miséricorde,
Nous conservera humbles.
Demandez-nous beaucoup, et aidez-nous à Vous donner davantage.
Et puisque nous sommes livrés à vous,
Ne Vous gênez pour nous prendre au mot et pour nous sacrifier ;
Nous Vous le demandons malgré le tremblement de notre chère,
Car nous voulons n’avoir qu’une crainte, celle de ne pas vous aimer assez.
Et quand, au soir de notre dernière bataille,
Votre voix de chef sonnera le ralliement de tous Vos chevaliers,
Faites Seigneur, c’est notre suprême prière,
Faites que notre mort serve à quelque chose,
Et accordez-nous la grâce de mourir debout.

Ainsi soit-il.

13.4.07

TESTAMENT DE LOUIS XVI

Au nom de la Très Sainte Trinité du père du Fils et du Saint Esprit, aujourd’hui vingt cinquième jour de Décembre, mil sept cent quatre vingt douze Moi Louis XVIe du nom Roy de France étant depuis plus de quatre mois enfermé avec ma famille dans la Tour du Temple à Paris par ceux qui étaient mes sujets, et privé de toute communication quelconque, même depuis le onze du courant avec ma famille de plus impliqué dans un Procès, dont il est impossible de prévoir l’issue à cause des passions des hommes et dont on ne trouve aucun prétexte ni moyen dans aucune Loi existante, n’ayant que Dieu pour témoin de mes pensées et auquel je puisse m’adresser, je déclare ici en sa présence mes dernières volontés et mes sentiments.
Je laisse mon âme à Dieu mon créateur, je le prie de la recevoir en sa miséricorde, de ne pas la juger d’après ses mérites, mais par ceux de Notre Seigneur Jésus Christ, qui s’est offert en sacrifice à Dieu son Père, pour nous autres hommes quelqu’indignes que nous en fussions et moi le premier.
Je meurs dans l’union de notre sainte Mère l’Eglise Catholique Apostolique et Romaine qui tient ses pouvoirs par une succession non interrompue de St Pierre auquel Jésus Christ les avait confiés. Je crois fermement et je confesse tout ce qui est contenu dans le Symbole et les commandements de Dieu et de l’Eglise, les Sacrements et les Mystères tels que l’Eglise Catholique les enseigne et les a toujours enseignés.
Je n’ai jamais prétendu me rendre juge dans les différentes manières d’expliquer les dogmes qui déchire l’Eglise de Jésus Christ mais je m’en suis rapporté et rapporterai toujours si Dieu m’accorde vie, aux décisions que les supérieurs Ecclésiastiques unis à la Saint Eglise Catholique donnent et donnèrent conformément à la discipline de l’Eglise suivie depuis Jésus Christ. Je plains de tout mon cœur nos frères qui peuvent être dans l’erreur, mais je ne prétends pas les juger, et je ne les aime pas moins tous en Jésus Christ suivant ce que la charité Chrétienne nous l’enseigne.
Je prie Dieu de me pardonner tous mes péchés. J’ai cherché à les connaître scrupuleusement, à les détester, à les détester, à m’humilier en sa présence, ne pouvant me servir du Ministère d’un Prêtre Catholique je prie Dieu de recevoir la confession que je lui en ai faite et surtout le repentir profond que j’ai d’avoir mis mon nom (quoique cela fut contre ma volonté) à des actes qui peuvent être contraires à la discipline et à la croyance de l’Eglise Catholique à laquelle je suis toujours resté sincèrement uni de cœur, je prie Dieu de recevoir la ferme résolution où je suis s’il m’accorde vie, de me servir aussitôt que je le pourrai du Ministère d’un Prêtre Catholique pour m’accuser de tous mes péchés, et recevoir le Sacrement de Pénitence.
Je prie tous ceux que je pourrais avoir offensés par inadvertance (car je ne me rappelle pas d’avoir fait sciemment aucune offense à personne) ou ceux à qui j’aurais pu donner de mauvais exemples ou des scandales de me pardonner le mal qu’ils croient que je peux leur avoir fait.
Je prie tous ceux qui ont de la Charité d’unir leurs prières aux miennes, pour obtenir de Dieu le pardon de mes péchés.
Je pardonne de tout mon cœur, à ceux qui se sont fait mes ennemis sans que je leur en ai donné aucun sujet et je prie Dieu de leur pardonner, de même que ceux qui par un faux zèle, ou par un zèle malentendu, m’ont fait beaucoup de mal.
Je recommande à Dieu, ma femme, mes enfants, ma sœur, mes tantes, mes frères, et tous ceux qui me sont attachés par les Liens du Sang ou par quelqu’autre manière que ce puisse être. Je prie Dieu particulièrement de jeter de yeux de miséricorde, sur ma femme, mes enfants et ma sœur qui souffrent depuis longtemps avec moi, de les soutenir par sa grâce s’ils viennent à me perdre, et tant qu’ils resteront dans ce monde périssable.
Je recommande mes enfants à ma femme, je n’ai jamais douté de sa tendresse maternelle pour eux, je lui recommande surtout d’en faire de bons Chrétiens et d’honnêtes hommes, de leur faire regarder les grandeurs de ce monde-ci (s’ils sont condamnés à les éprouver) que comme des biens dangereux et périssables et de tourner leurs regards vers la seule gloire solide et durable de l’Eternité, je prie ma sœur de vouloir bien continuer sa tendresse à mes enfants, et de leur tenir lieu de mère, s’ils avaient le malheur de perdre la leur.
Je prie ma femme de me pardonner tous les maux qu’elle souffre pour moi, et les chagrins que je pourrais lui avoir donné dans le cours de notre union, comme elle peut être sure que je ne garde rien contre elle, si elle croyait avoir quelque chose à se reprocher.
Je recommande bien vivement à mes enfants, après ce qu’ils doivent à Dieu qui doit marcher avant tout, de rester toujours unis entre eux, soumis et obéissants à leur mère, et reconnaissant de tous les soins et peines qu’elle se donne pour eux, et en mémoire de moi je les prie de regarder ma sœur comme une seconde mère.
Je recommande à mon fils s’il avait le malheur de devenir Roi, de songer qu’il se doit tout entier au bonheur de ses concitoyens, qu’il doit oublier toute haine et tout ressentiment et nommément tout ce qui a rapport aux malheurs et aux chagrins que j’éprouve, qu’il ne peut faire le bonheur des Peuples qu’en régnant suivant les Lois, mais en même temps qu’un Roi ne peut les faire respecter, et faire le bien qui est dans son cœur, qu’autant qu’il a l’autorité nécessaire, et qu’autrement étant lié dans ses opérations et n’inspirant point de respect, il est plus nuisible qu’utile.
Je recommande à mon fils d’avoir soin de toutes les personnes qui m’étaient attachées autant que les circonstances où il se trouvera lui en donneront les facultés, de songer que c’est une dette sacrée que j’ai contractée envers les enfants ou le parents de ceux qui ont péris pour moi et ensuite de ceux qui sont malheureux pour moi, je sais qu’il y a plusieurs personnes de celles qui m’étaient attachées qui ne se sont pas conduites envers moi comme elles le devaient, et qui ont même montré de l’ingratitude, mais je leur pardonne (souvent dans les moments de troubles et d’effervescence on n’est pas le maître de soi) et je prie mon fils, s’il en trouve l’occasion, de ne songer qu’à leur malheur.
Je voudrais pouvoir témoigner ici ma reconnaissance à ceux qui m’ont montré un véritable attachement et désintéressé, d’un côté si j’étais seulement touché de l’ingratitude et de la déloyauté des gens à qui je n’avais jamais témoigné que des bontés, à eux à leurs parents ou amis, de l’autre j’ai eu de la consolation à voir l’attachement et l’intérêt gratuit que beaucoup de personnes m’ont montrés, je les prie d’en recevoir tous mes remerciements, dans la situation où sont encore les choses, je craindrait de les compromettre si je parlais plus explicitement mais je recommande spécialement à mon fils de chercher les occasions de pouvoir les reconnaître.
Je croirais calomnier cependant les sentiments de la Nation si je ne recommandais ouvertement à mon fils M. De Chamilly et Hue, que leur véritable attachement pour moi, avait porté à s’enfermer avec moi dans ce triste séjour, et qui ont pensé en être les malheureuses victimes, je lui recommande aussi Cléry des soins duquel j’ai eu tant lieu de me louer depuis qu’il est avec moi comme c’est lui qui est resté avec moi jusqu’à la fin, je prie Messieurs de la Commune de lui remettre mes hardes, mes livres, ma montre, ma bourse, et les autres petits effets qui ont été déposées au Conseil de la Commune.
Je pardonne encore très volontiers à ceux qui me gardaient, les mauvais traitements et les gènes dont ils ont cru devoir user envers moi, j’ai trouvé quelques âmes sensibles et compatissantes, que celles-là jouissent dans leur cœur de la tranquillité que doit leur donner leur façon de penser.
Je prie Messieurs de Malesherbes, Tronchet et de Sèze, de recevoir ici tous mes remerciements et l’expression de ma sensibilité, pour tous les soins et les peines qu’ils se sont donnés pour moi.
Je finis en déclarant devant Dieu et prêt à paraître devant lui que je ne me reproche aucun des crimes qui sont avancées contre moi. Fait en double à la tour du Temple le vingt cinq décembre mil sept cent quatre vingt douze.
LOUIS

12.4.07

Le Bien Commun

La politique aspire secrètement à produire l'éclosion de la sagesse et, pour donner suite à ses voeux, elle promeut la pratique des lettres, des sciences, des arts et l'instruction en général. Elle a également soin de maintenir la discipline, de favoriser la vertu et d'assurer la protection tant intérieur que extérieur par l'organisation de la police et de l'armée. Il lui appartient aussi de veiller à la santé publique, au dévelopement de la famille, à la distribution des biens, à leur transmission, à leur circulation par le commerce, à leur production par l'agriculture et l'industrie. Et le plus mystérieux est que tout cela ne constitue qu'un seul bien, le Bien Commun.
L. LACHANGE O.P.