La société est une réunion d'hommes qui agissent ensemble en vue du Bien Commun. La toute première des sociétés est la famille. Cependant, elle ne se suffit pas à elle même pour assurer sa perfection et son bonheur.
De cette insuffisance de la famille à pourvoir aux besoins de ses membres émerge naturellement une union organique des cellules familiales sur le plan local (communes, provinces) ou de certains membres de la famille sur le plan économique (associations professionnelles). C'est pourquoi, on peut parler d'une conception organique de la société dans laquelle des entités de différentes tailles et de différentes importances contribuent à un bien commun auquel participe chacun des ses membres.
Ces entités intermédiaires manquent d'une certaine perfection car elles ne sont que des moyens pour la cellule de base et qu'elles ont besoin d'un principe directeur au dessus d'elles. Ce dernier est constitué par l'État garant de tous ses membres (la Nation) et de leur héritage (la Patrie). Contentons nous de citer Aristote: « La société qui s'est formée de la réunion de plusieurs villages constitue la cité qui a la faculté de se suffire à elle même, étant organisée non seulement pour conserver l'existence, mais encore pour procurer le bien être. Cette société est donc elle aussi dans le vœu de la nature, comme toutes les choses qui en sont les éléments (...) Se suffire à soi-même est un but auquel tend toute production de la nature, et cet État est aussi le plus parfait. Il est donc évident que l'homme est naturellement fait pour la société politique ».
Notre conception de la société s'oppose donc à la vision individualiste ou collectiviste de l'État Nation. Ces dernières nient les communautés naturelles au motif qu'elles entraveraient La Liberté de l'Homme.
Ni libéraux, ni socialistes, nous pensons que l'organisation administrative de l'État doit favoriser un étagement des pouvoirs et des sources d'autorité pour que les décisions soient prises au plus près des réalités et des besoins des hommes.
La décentralisation, reposant sur la coexistence d'une autorité centrale et d'une pluralité d'autorités locales autonomes, nous semble aller dans le bon sens. Bien menée, elle semble obéir au principe de subsidiarité et maximiser le nombre de corps intermédiaires. Le principe de subsidiarité est pour nous une règle maîtresse de l'organisation sociale. A savoir : « de même qu'on ne peut enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté les contributions dont ils sont capables de s'acquitter de leur propre initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d'une manière dommageable l'ordre social que de retirer aux groupements d'ordre inférieur pour les confier à une collectivité plus vaste les fonctions qu'ils sont en mesure de remplir eux même » (Pie XI). En application de ce principe, les corps, emboîtés les uns dans les autres, sont complémentaires. Chacun possède la compétence pour gérer les problèmes qu'il connaît et il a l'autorité pour le faire.
Certes le mondialisme veut faire sauter le verrou de la nation. La question qui se pose est de savoir si l'on défendra mieux la nation en refusant de décentraliser qu'en l'acceptant. Pour défendre la nation, on ne peut pas ne pas vouloir le développement de ses forces vives. Or les forces vives et réelles d'une nation sont essentiellement au plan économique, les entreprises et les métiers, et au plan régional, les communes et les régions.
Redonner des forces vives à la nation implique donc une réhabilitation du régionalisme, non pas en tant que ferment de division mais précisément parce qu'une nation a besoin d'assises stables. Les mouvements séparatistes ne sont souvent que les conséquences du centralisme jacobin et de la tyrannie des technocrates parisiens. Le respect de l'identité locale et provinciale, loin de détruire le sentiment national, le renforcera car c'est de l'enracinement sur le sol natal que naît l'amour de la Patrie. L'identité régionale est constitutive de l'identité nationale. L'Etat doit donc respecter le principe de subsidiarité. C'est aux corps intermédiaires à rythmer la vie de la nation, l'Etat ne devant intervenir qu'en cas de dysfonctionnement des sphères inférieures. Il est responsable du Bien Commun national (justice, défense nationale, paix intérieure).
Nous sommes actuellement dans une civilisation industrielle dominée par l'Etat moderne planificateur, jacobin, centralisateur et totalitaire, axé sur une économie de producteur dépourvue de finalité. Mais une société ne peut survivre que si elle est intérieurement innervée par ces noyaux diffuseurs de vie que sont les communautés naturelles. En effet, il est impossible de gouverner une société moderne, sans disposer d'interlocuteurs au sein de la société civile et du monde socioprofessionnel.