11.7.08

UN FRONT DE LA "PETITE" PRESSE

Ce qu'on appelle la « petite » presse constitue en fait l'une de ces organisations qui, lorsqu'elles sont déjà correctement orientées, peuvent favoriser l'éclosion de réseaux sociaux naturels dans le sens favorable.

A cet égard, une mention toute spéciale peut être réservée à cette « petite » presse en raison de ses possibilités particulières d'efficacité. Parce qu'elle a vocation d'information, il entre dans son rôle d'aider à la formation des esprits ; et parce qu'elle possède son « réseau » d'abonnés et son système de diffusion, elle peut contribuer à la structuration des ensembles humains et à la coordination de leurs activités contre la Révolution.

Il ne faut pas ignorer l'individualisme – parfois négativiste – de certaines publications ou revues qui voient d'un mauvais œil toute idée de « mise en commun » de quoi que ce soit avec un collègue, ne fût-ce que l’acceptation d'une même idée de manœuvre contre la Révolution... Certes, il est légitime que chacun veuille préserver sa personnalité, et c’est d’ailleurs cette personnalité qui lui vaut sa clientèle. Elles peuvent garder jalousement leurs caractères propres, mais leur accord sur les mêmes idées essentielles doit leur faire admettre la nécessité d'une tentative de coordination de leurs efforts. Quelqu'un pourrait-il le refuser devant l'importance de l'enjeu ?

On entend parfois déclarer : « Nous ne pourrons rien faire tant que nous n'aurons pas les mass média... » Mais non ! La possession des mass média supposerait en fait le problème résolu ! A l'heure actuelle, qui pourrait envisager la possibilité d'obtenir des moyens d'une telle importance ? « Avoir » les mass media est donc exclu, si ce n'est en les gagnant peu à peu au cours d'une évolution de l'opinion publique, ceci étant l'une des conséquences naturelles de l'action politico-sociale à mener. Il est évident que cette évolution pourrait se trouver singulièrement accélérée par certains événements mondiaux ou nationaux.

La « grande » presse est également hors de portée, mais celle que l'on qualifie de « petite » a autrement plus de mérite. Il est bien entendu qu'il s'agit ici de celle qui défend les principes de notre Civilisation chrétienne – même quand le terme « chrétien » n'est pas affiché – et qui, en outre, non seulement n'attend rien de certains adversaires de notre Civilisation, mais sait « se compromettre » jusqu'à les désigner pour ce qu'ils sont. Elle se bat pour faire passer les idées essentielles : celles qui n'intéressent plus une masse en quête de lectures faciles et distrayantes, celles qui n’augmenteraient ni la clientèle ni les bénéfices des organismes de « grande presse »…

Notre « petite » presse, en revanche, s’adresse à une élite relative qui, hélas, n’as pas pour l’instant de chef « sur le terrain ». Elle réussit à survivre dans l'attente d'un réveil dynamique de la part du Pays réel... C'est celle que tant d'hommes s'obligent à recevoir et à lire parce qu'elle est déjà bien orientée ; celle qui est faite de toutes ces revues, périodiques, illustrés, magazines, bulletins mensuels, feuilles hebdomadaires qui, au total, font un tirage mensuel dépassant peut-être le million. Mais ce nombre ne prend sa valeur réelle qu'au regard de la qualité que nous pouvons en attendre.

Après l'action individuelle, courageuse, obstinée, souvent menée isolément par ces éléments, un front de cette petite presse peut se manifester de façon plus tangible. Sa base pratique résidera en une coordination des efforts sur des idées simples et des recommandations adaptées aux circonstances politico-sociales du moment.

Qui formulera ces recommandations, et sous quelle forme ? Cela est un problème d'action, à prendre en tant que tel par les intéressés ; et sans entrer ici dans le détail de cette étude, il semble qu'une solution pourrait s'orienter vers une concertation de chefs naturels s'appuyant sur une étude prospective poursuivie au jour le jour par un comité de réflexion.

La petite presse en serait la première bénéficiaire et, en retour, le front de la petite presse peut devenir le support le plus précieux d'une action civique à l'échelon national.

Extrait de La Voix du Pays réel du Colonel Chateau-Jobert

12.6.08

LE CONTRAT SOCIAL (tiré de la Conjuration Antichrétienne de Mgr Delassus

J.-J. Rousseau s'inscrivit en faux contre ces données de la raison et de la foi ; et voici ce qu'il imagina, ce qu'il consigna dans tous ses écrits, et ce que la maçonnerie s'est donnée la mission de réaliser. La société, l'état social, ne résulte point de la consti­tution de l'homme et de l'institution divine; c'est, dans le monde, une excroissance accidentelle et l'on pourrait dire contre nature, qui est survenue un beau jour par le fait des volontés humaines.
Les hommes vivaient à l'état de nature, dit J.-J. Rousseau, comme le font les sauvages, les animaux, et c'était l'âge d'or; état de liberté et d'égalité, où les fruits étaient à tous et la terre à personne, où chaque homme était citoyen de l'univers.
Pour passer de l'état de nature à l'état social, les hommes primitifs firent un pacte, un contrat, « le contrat social (1) ». D'une part, chaque indi­vidu se remit, sa personne et tous ses droits, entre les mains de tous; d'autre part, tous garantirent à chacun une part égale des biens communs. L'individu donna à la société tout ce qu'il a et tout ce qu'il est, et la société admit l'individu à la communion de toute la chose publique, de la république.
« Les clauses du pacte social, dit J.-J. Rousseau (2), se réduisent toutes à une seule : l'aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté... S'il restait quelques droits aux particu­liers, l'état de nature subsisterait et l'association deviendrait nécessairement vaine... L'aliénation se faisant sans réserve, l'union est aussi parfaite qu'elle peut l'être, et nul associé n'a plus rien à réclamer. »
Voilà l'idée que la maçonnerie se fait de la so­ciété, voilà le plan sur lequel elle veut la reconsti­tuer. Si longtemps que cela ne sera point complète­ment réalisé, c'est-à-dire si longtemps que les indi­vidus prétendront conserver quelques droits, l'état social, tel que le contrat l'a fait, tel qu'il doit être, ne sera point jugé parfait; l'état de nature, auquel le contrat a voulu mettre fin, subsistera en quelque chose. Le progrès, c'est donc la marche vers l'absorption complète de tous les droits par l'Etat; plus de droits pour l'individu, plus de droits pour la famille, plus de droits à plus forte raison pour une société quelconque qui se formerait au sein de l'Etat, ou au-dessus de lui.
Dans la société démocratique rêvée par la Franc-Ma­çonnerie il n'y aura plus ou il ne doit plus y avoir que ces deux Unités : l'individu et l'Etat. D'un côté l'Etat omnipotent, de l'autre, l'individu impuissant, dé­sarmé, privé de toutes les libertés, puisqu'il ne peut rien sans la permission de l'Etat.

N’est-ce pas vers cela que nous marchons à grands pas? et cette conception de la société n'est-elle point l'explication, et, pour nos maçons, la justification de tout ce qui est actuellement fait ou tenté contre la liberté de l'Eglise, contre la liberté des associa­tions, contre la liberté des familles, contre la liberté individuelle elle-même? L'Etat ne peut, ne doit souf­frir aucune association autre que celle qu'il est. Si des événements passés, si des individualités puissantes ont créé au sein de la société civile des associations distinctes, l'Etat doit travailler constamment à rétré­cir le cercle dans lequel elles vivent et agissent, jusqu'à ce qu'il soit parvenu à les absorber ou à les anéantir. Selon Rousseau, selon la Maçonnerie, c'est là son droit, c'est là son devoir, droit et devoir qui décou­lent directement du contrat social, et sans l'exercice desquels ce contrat deviendrait illusoire et bientôt caduc.
Que l'on cesse donc de s'étonner que dans cette so­ciété sortie de la Révolution, pétrie de l'idée révolu­tionnaire, l'Etat veuille tout centraliser et tout absor­ber, étouffer toute initiative et paralyser toute vie : il obéit en cela à sa loi, au principe d'après lequel il doit être tout, tout lui ayant été livré par le con­trat initial. Ce qui vit, ce qui se meut, ce qui est en dehors de lui, ne l'est et ne le fait que par une usur­pation dont il doit être rendu compte pour restitu­tion.
Cette revendication doit s'exercer surtout à l'égard des associations, parce qu'elles sont plus puissantes que les individus, et surtout à l'égard des associa­tions qui ont un idéal autre que celui de l'Etat natura­liste. Le pacte social a été contracté pour une plus complète jouissance des biens de ce monde. S'il est des sociétés formées dans le but de porter ailleurs le regard de l'homme, de l'exhorter à se détacher des biens présents pour ambitionner et poursuivre, d'autres biens, ces sociétés sont la contradiction vi­vante de la société sortie du contrat social, elles doivent disparaître avant toute autre. Le devoir est de les traquer, de les mutiler jusqu'à une complet anéan­tissement. C'est là l'explication des calomnies ré­pandues par les humanistes dans leurs écrits contre les religieux, et, des persécutions sans cesse renou­velées contre eux depuis la Renaissance jusqu'à nos jours, comme aussi, de la guerre à mort déclarée aujourd'hui à la première des sociétés religieuses, à celle qui est le fondement et le principe de vie de toutes les autres, à l'Eglise catholique.
On constate actuellement un mouvement de réac­tion contre l'état social institué en France par la Révolution. On institue partout des syndicats, on re­tourne aux corporations. Puisse ce mouvement aboutir à la restauration de la société dans son état normal ! Dans la société normalement organisée, il y a entre l'individu et l'Etat des sociétés intermédiaires qui en­cadrent les individus et qui par leur action naturelle maintiennent l'Etat dans le domaine qui lui appar­tient et l'empêchent d'en sortir. Ces sociétés se nom­ment : familles, corporations, communes, provinces, Eglises. Que, dans ce régime, le plus faible des individus soit lésé par l'Etat ou par tout autre, aussi­tôt c'est son association, c'est toute une collecti­vité organisée qui se lève pour le défendre. Par elle, il est fort; et parce qu'il est fort, il est libre.
La démocratie, c'est l'esclavage.


1. J.-J. Rousseau n'est point, à proprement parler, l'in­venteur du contrat social. C'est un protestant, Hubert Languet, qui, dans le Vindiciai contra tyrannos, sous le pseudonyme de Junius Brutus, exposa pour la première fois la théorie d'un « contrat », origine de la société.
Il est aussi absurde de supposer un. pacte primitif fondamental de la société publique, qu'il serait absurde de supposer un pacte constitutif de la famille entre le père et les enfants. Bonald dénonce le cercle vicieux où tombe Rousseau : « Une loi, ne fût-ce que celle qui réglerait les formes à suivre pour faire la loi; un homme, ne fût-ce que celui qui l'aurait proposée, aurait toujours précédé cette prétendue institution du pouvoir, et le peuple aurait obéi avant de se donner un maître ». Bossuet avait dit avant de Bonald : « Bien loin que le peuple en cet état (sans loi et sans pouvoir) pût faire un souverain, il n'y aurait même pas de peuple ».


2. Contrat social, livre I, ch. VI.

10.5.08

LE PEUPLE EST AUTRE CHOSE QUE LA DEMOCRATIE

Démocratie… Jamais peut-être autant qu’aujourd’hui il n’a importé que ce mot fût défini pour qu’on n’en jouât plus.
M. Frossard atteste les poètes et les philosophes. C’est beaucoup et c’est peu. M. Paul-Albert Robert, professeur honoraire à la Faculté libre de droit de Marseille, a écrit, dans une lettre au Temps, lettre pleine d’excellents arguments contre le régime électif, cette opinion très personnelle, que l’Eglise a su « réussir pleinement la solution de ce délicat problème : faire surgir l’autorité suprême de la démocratie… » Voyons, pourquoi ne pas être exact ? Ce qui surgit d’autorité dans l’Eglise ne vient pas de la démocratie, puisque cela ne sort nullement d’un peuple-roi mais d’un peuple tout court, et d’un peuple d’ailleurs gouverné. Pourquoi confondre les deux termes ? L’un dit : gouvernement du peuple. L’autre dit : condition populaire. Si le peuple catholique régnait, s’il s’agissait à son propos d’une démocratie véritable, le problème serait résolu sans effort (mais au pire sens) et l’autorité (mal constituée, mais constituée) n’aurait pas à « surgir » d’un jeu complexe et alternant de désignation par en haut et d’élection exercée sur un plan déjà patricien.
La démocratie n’est pas le peuple, c’est le gouvernement d’un peuple dont les membres sont comptés un par un : un homme, un vote, cet homme et ce vote étant réputés souverains et créateurs d’une souveraineté soit directe soit déléguée. On sait quel mal cette institution a fait à la Belgique après la victoire de 1918 : on y avait précédemment le vote plural ; le vote plural peut, dans son ensemble, être démophile, ami et bienfaiteur du peuple, son sauveur, son conservateur : il n’est pas démocrate, puisqu’il institue une autorité fondée non sur la quantité, mais sur la qualité, celle de chef de famille, d’époux, de père, de diplômé, de possédant, etc… Les qualités prévalent sur le nombre. En démocratie, le Nombre, par définition, ignore la Qualité, et la façon dont il prévaut sur elle ne naît pas d’une corruption, ni d’une crise, ni d’un abus : il est lié à la logique de son pouvoir.
Dans sa lettre, M. Paul-Albert Robert proteste contre la brigue. Et il a raison. Les beaux temps de la République romaine, patriciens dans l’âme, avaient la brigue en horreur. L’élection vraie, l’élection juste est celle qui n’est pas sollicitée qui jaillit comme un cri public vers le mérite ou la compétence : Ambroise évêque ! Ambroise évêque ! Ce n’est donc pas l’élection démocratique. Celle-ci, non contente de tolérer la brigue, en fait un devoir et une loi : notre scandaleux système de « déclaration de candidature », établit après le Boulangisme, interdit aux électeur d’aller spontanément, librement, naturellement, à l’homme de la circonscription qu’ils savent apte à les servir ; il faut que celui-ci soit allé dire à Monsieur le Préfet : je suis candidat. Quelle honte ! Mais quel aveu ! La démocratie bénéficie de l’ambition des candidats comme de la compétition des partis. Elle vit de cela, et de cela seul.
Certains auteurs, et des plus grands, entre les Maîtres de jadis, ont paru se montrer moins radicalement hostiles à la démocratie. L’autorité d’Athènes, dont l’histoire ne laisse pas d’être cruellement exemplaire, semble avoir fait hésiter un Aristote si rigoureux d’ordinaire. Il faut avouer que sa Politique n’est pas exactement le Traité de la science de la durée et de la prospérité des Etats ; il y manque, en plus d’un endroit, des distinctions indispensables. Le droit, le devoir, l’utile, le nécessaire, y semblent parfois confondus. Tels de ses disciples, comme saint Thomas d’Aquin sont bien plus nets. Non partout : son De Regimine Principum est un traité de l’action politique, c’est-à-dire d’une action qui ressortit, comme toute action, à l’éthique ; il ne traite pas de la STRUCTURE des Etats politiques. La Somme est autrement instructive à cet égard. Mais, de toute évidence Bossuet est en progrès sur Saint Thomas, comme Bonald sur Bossuet et notre La Tour du Pin sur Bonald. Sans la moindre foi au progrès, l’on est bien obligé d’avouer que des travaux persévérants conduits dans le même sens par des générations de hautes intelligences nourries des mêmes principes, dévoilent et dégagent de croissantes lumières.
Leur Père à tous, Aristote, paraît même en progrès sur lui-même quand on compare à sa Politique, défectueuse par moments, la lumineuse monographie découverte en 1890, intitulée : la Constitution d’Athènes, que d’autres traduisent : la République des Athéniens, où la matière proprement politique est distinguée par l’analyse philosophique de l’histoire, et isolée des questions latérales tirées de l’impératif moral. Bien que la déontologie médicale doive se mettre en règle avec le décalogue, il ne faut pas mêler les affaires d’éthique à des affaires d’anatomie. Ce petit livre inestimable, bienfait posthume d’Aristote à ses arrière-neveux, mériterait d’être lu et médité par les esprits que préoccupe le problème de la démocratie. Il fut l’objet d’un cours à l’Institut d’Action française de 1906, dans une chaire dite de l’Empirisme organisateur : c’est un des plus beaux souvenirs de notre jeunesse, alors expirante, et quels amis n’y voyons-nous pas assis sur le même banc,- de Lucien Moreau et de Jacques Bainville à Léon de Montesquiou, à Robert de Boisfleury, à Pierre Gilbert !
Il faudrait donc que cela serve. Répétons que la démocratie est la grande créatrice, excitatrice et stimulatrice de ce mouvement collectif, dénommé la lutte des classes. Je ne comprends pas comment M. Frossard peut opposer à cette évidence les réflexions marxistes sur « le patricien et le plébéien de l’ancienne Rome ». Car elles la confirment.
Très précisément, les conflits sociaux gréco-romains, les longues guerres des pauvres contre les riches, et la destruction de la Cité et de la Ville sont sortis de la démocratie. Avant elle, la coopération des classes se faisait tant bien que mal. Après elle, de cette démocratie politique et de son parti sortit l’institution canonique de leurs rivalités d’intérêt. Celles-ci auraient pu exister, mais elles auraient pu aussi ne pas exister, suivant le cas, les circonstances, les évènements… La démocratie les a rendues nécessaires.
Cela de tous temps. Il y eut des heures où les ouvriers du cuir de Limoge ont voulu obtenir des patrons du cuir un salaire supérieur ; il sonna d’autres heures où les mêmes ouvriers et les mêmes patrons, menacés par des industriels tchécoslovaques, ont fondé, toujours à Limoges, une entente sur le commun intérêt de leur travail, bien supérieur aux antagonismes de leurs classes. Cette union est naturelle dans un pays non démocratique. Elle est particulièrement difficile quand un pays comme le nôtre ou comme Rome décadente, est doté du régime politique du Nombre et de son vote : les partis naissants cherchent et trouvent dans les classes rivales ce qu’on peut appeler l’eau mère de leur cristal. Ce qui était accidentel, et fortuit, l’antagonisme social, devient régulier et constant, en vertu de la structure légale de la cité. C’est d’elle, en conséquence, que le mal vient ou, si l’on veut, qu’il devient mal chronique et constitutionnel. Un socialisme sans démocratie peut aboutir à une organisation nationale et sociale du travail. Le socialisme démocratique va, court, se précipite à la lutte des classes prolongée jusqu’à leur ruine. Comme la démocratie produit dans l’Etat absolument les mêmes effets que dans la société, elle est bien le mal et la mort. Une République peut être en règle avec les lois de la durée et de la prospérité des peuples, une Démocratie jamais.
On a vu de grandes Républiques durer et croître du moment qu’elles étaient en conformité avec les conditions héréditaires de la vie des Etats : leurs pouvoirs collectifs ont été longtemps productif et florissant. Cela ne s’est vu d’aucune Démocratie. Tous leurs débuts ont coïncidés avec la consommation et la dissipation des ressources, la dégradation et l’exagération de l’autorité, l’affaiblissement de l’Etat, et les empiètements de l’Etatisme, avec la centralisation en même temps que la décomposition. Les peuples les mieux doués, les pays les plus favorisés, ont tous reçu de la démocratie le même souffle de décadence qu’elle a répandu chez nous entre 1789 et 1939 : il y a le même siècle et demi de cette course à la mort chez le peuple d’Athènes, entre 490, l’année de Marathon, et 338, l’année de Chéronée ; encore, la guerre du Péloponnèse, qui accéléra ce déclin, était de 431 : plus près de la grande victoire que de la défaite définitive.
Encore cette démocratie était-elle tempérée par toute sorte de rudes défenses : esclavage, métèques, tirage au sort des archontes (et non leur élection comme on faisait des stratèges) et le fameux : « Qui est ton père ? Qui est ta mère ? Et le père de ton père ? » La flamme du verbalisme démocratique fut la plus forte que tout et plus destructive. En fait, rien n’a jamais tenu contre cette puissance de mort.
Le Play disait : « La monarchie dans l’Etat, l’Aristocratie dans la Province, la Démocratie dans la Commune. » Erreur patente, il faut le dire avec tout le respect dû à ce maître, erreur née d’une fausse symétrie. Que vaut la démocratie dans la commune ? Nos finances municipales, nos polices municipales, nos convulsions et nos léthargies municipales répondent qu’elle n’y vaut rien, et pis que rien.
L’expérience que la France en a faite est probante. Le Play voulait sans doute dire : République dans la Commune. Mais il savait fort bien que, heureusement pour elles, un grand nombre de petites communes, ayant pour maire un propriétaire terrien, parfois châtelain, sont de menues seigneuries constitutionnelles, qui ne connaissent même pas un statut républicain. Pour les grandes agglomérations, ce sont, ce doivent être des Aristocraties comme les Provinces, mais d’un caractère spécial : la bourgeoisie y est moins différenciée que dans les capitales de provinces, les grandes fortunes y sont moins personnelles, et cette réunion de foyers se rapproche davantage du type communautaire, le nom le dit assez bien, avec son prolongement non moins significatif de biens communaux. La Tour du Pin disait avec raison que la commune est la famille de ceux qui n’en ont pas, il entendait une grande famille au sens historique. Rien de démocratique dans cette commune-là ! Car lorsque la démocratie s’y introduit, avec le souverain suffrage égal et unitaire, on peut dire que ce bon fruit reçoit le ver qui le rongera.
Il me semble difficile de résister à ce corps d’évidences, qu’il serait possible de rendre plus clair encore.
Quant aux censures que les marxistes faisaient de la démocratie, M. Frossard en aurait-il été dupe lui aussi ? Je l’avoue : ce fut mon cas. Il y a fort longtemps et pour un temps très court.
Quelques conversations et quelques lectures de socialisme orthodoxe suffirent à me montrer que, si les Partis et les Classes y étaient hautement préférés aux « grues » métaphysiques dont parlait Paul Lafargue, le gendre de Marx, on n’en considérait pas moins le jeu naturel de la Démocratie comme le grand ressort de la lutte sociale et le meilleur engin qui pût servir aux camarades et aux militants. Preuve : le merveilleux emploi, de plus en plus socialiste, fait des scrutins démocratiques, depuis le retour des communards amnistiés (1880) jusqu’aux élections du front populaire (1936). Et cela se comprend : tout organisateur qu’il se prétende, le socialisme ne veut organiser le travail qu’au profit de l’égalité ; le socialisme marxiste est à fins égalitaires ; il tend à la démocratie politique. Qu’est-ce, au surplus, que l’égalité politique sans égalité sociale ? Une simple fiction. Les deux systèmes se soutiennent partout et ne peuvent se contredire sérieusement nulle part. On n’épurera le socialisme, on ne lui rendra une valeur naturelle et humaine qu’à la condition de le délivrer de toute politique démocratique. Alors, et alors seulement, cet égalitarisme extérieur ayant disparu, on pourra substituer à son égalitarisme intrinsèque les principes d’entr’aide et d’interdépendance qui sont la condition de la vie et des progrès de toute nation.
Le seul mot de démocratie crée un péril pour l’ordre et la paix. A l’exemple de Le Play qui, pourtant fort attentif au vocabulaire, voulut faire dire à ce mot ce qu’il ne dit point, La Tour du Pin eut, un jour, une courte hésitation, il inclina même à cet usage malsain. Armée de son merveilleux petit livre, Aphorismes de sciences sociales, notre jeunesse osa le rappeler à ses propres principes. Il eut la bonté généreuse de s’y rendre comme à la vérité. Pourquoi nos conservateurs et nos nationaux n’ont-ils pas fait comme lui ? Cette joie, ces hautes délices, cette béatitude d’être dans le vrai les auraient certainement consolés du plaisir qu’ils nous auraient fait.
M. Paul-Albert Robert invoque le prestige de l’histoire ecclésiastique en faveur de ce qu’il appelle « démocratique » et qui n’est point démocratique. Est-ce que ces vagues ressemblances, ces reflets approchés de la démocratie, n’ont pas été trop souvent capables d’imposer ou inspirer des déviations dangereuses ?
Comment peut-il bien comparer une grande société d’âmes comme l’Eglise, à nos sociétés charnelles ? Celles-ci ne sont point filles de notre volonté. Elles sortent de notre sang, de notre naissance : natio, le mot le dit. Alors, pourquoi éliminer, par suite d’on ne sait quelle timidité instinctive, le procédé naturel de la transmission du commandement, qui est l’hérédité physique, le même qui sert à transmettre les autres biens ? L’histoire est le panégyrique vivant des monarchies héréditaires, en particulier dans notre France. Quelle phobie en peut éloigner ? Et nos cent cinquante-deux années de démocratie parlementaire ou plébiscitaire sont-elles si brillantes qu’il faille se dire les uns aux autres : Comme on est bien là ! Et comme il fait bon d’y rester !
Tiré de « De la colère à la justice – réflexions sur un désastre »
De Charles Maurras
1942

15.2.08

Réflexions sur la montée de l'islam en France.

Les médias français ont délibérément jeté le voile sur un point brûlant de l’actualité : le financement des constructions de mosquées et l’essor des lieux de cultes musulmans. Ils sont actuellement recensés au nombre de 1535.

C’est ainsi que l’actuel locataire de l’Elysée se veut le garant absolu de l’émancipation et de l’édification sur notre sol d’un islam de France, jusqu’à ce qu’une véritable institutionnalisation s’en suive.

L’ex-ministre de l’intérieur a donc réaffirmé sa volonté de relancer le débat à ce propos. C’est le 1er octobre dernier, devant la tribune de la fondation du conseil français du culte musulman à la grande mosquée de Paris, qu’il évoque clairement son intention de financer les constructions et d’assurer l’essor des lieux de culte déjà existants, avec toute la structure que cela implique : édifications de mosquées « cathédrales » ou nouveaux endroits de prières, formation de ministres du culte (imams), filières d’enseignement coranique, bibliothèques attenantes, divers pôles éducatifs et commerciaux (librairies, barbiers, épiceries…) etc. :

Il déclare : « Après l’heure de la construction, voici l’heure de la consolidation », et,

« la fondation pour les œuvres de l’islam de France, qui a pour objectif de financer les lieux de culte à la mesure du respect que doit inspirer une grande religion » ou encore,

« l’islam est une composante intime de notre pays » et « c’est aussi une partie de la France ».(allocution reprise sur le site internet de l’Elysée).

Tels sont les propos d’un promoteur du multiculturisme, qui échangerait bien églises contre mosquées. Mais à quel prix ?!

Pour se porter officiellement sponsor au développement de l’islam en France, en récupérer le fruit, et nous les pépins, l’état propose un « toilettage » de la loi de 1905, sur la séparation de l’église et de l’état (dont les authentiques nationaux que nous sommes sont bien entendu fermement opposés), alors que dans l’article 2, « la république ne reconnaît, ni ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ».

Cheval de bataille discret et sournois des instances politiques, et sous prétexte d’éviter l’implication financière de certains états fondamentalistes du monde arabe, la réforme de la loi (initiée dans le rapport Machelon) permettrait de considérer une liberté des cultes et des religions sans distinction, donnant à l’état l’assurance légale d’une participation démesurée aux investissements et justifiant le financement de multiples projets, coûteux de plusieurs millions d’euros. Puisque ce n’est pas avec quelques pièces dans la corbeille ça et là, que s’érigeront ces gros chantiers.

C’est dans l’optique de faire passer la pilule, que le nain le l’Elysée déclarait : « Pour lutter contre l’intégrisme et le communautarisme, il faut que toutes celles et ceux qui ont la foi, puissent la vivre et la pratiquer en toute égalité ». (Quotidien La Croix du 21 septembre 2007).

Sachez qu’en région parisienne :

- à Montigny-lès-Cormeilles, sera inauguré prochainement un minaret de 700 m2 avec salle de conférence, salon de thé, pour un montant de 800000 euros, (le parisien),

- à Créteil, un coût total de 4 millions d’euros pour un future lieu de prières,

- pour la mairie communiste de Sevran, une future mosquée géante à capacité d’accueil de 5000 personnes verra le jour pour une bagatelle de 5 millions d’euros.

Les mosquées devraient se développer fortement dans le quart sud-est avec :

- à Annecy, la démolition puis la reconstruction d’une grande mosquée moyennant un coût de 3.6 millions d’euros sur un terrain vendu pour un euro symbolique. Le fisc de la ville prévoit même pour les fidèles ou les tiers sympathisants du culte une réduction d’impôt de deux tiers sur le somme donnée pour sa construction, manière habile de contourner la loi et de financer indirectement les travaux,

- à Grenoble, pas moins de 3 projets sont en cours,

- 5 millions d’euros pour la commune de Grigny avec en prime le terrain offert par la municipalité,

- à Givorss en région lyonnaise, 1.5 millions d’euros sont nécessaires à la réalisation d’une mosquée de 1200 m2. Il est intéressant de noter qu’en juillet dernier, la communauté locale ne disposait que du tiers de la somme demandée pour une édification débutant 2 mois plus tard,

- à Marseille, un loyer annuel de 300 euros seulement est « exigé » pour un terrain pratiquement d’un hectare ! (observatoire de l’islamisation).

Entendons bien qu’il s’agit là d’une liste non exhaustive, et que partout en France des cas similaires abondent.

Dans certaines grandes villes de France, les tribunaux administratifs saisis par des organisations luttant contre l’islamisation de la France, ont retardé l’échéance de ces chantiers. En effet dans la majeure partie des cas, la municipalité ou les pouvoirs locaux, donnaient, ou sous-louaient à des prix en deçà des indices du marché de l’immobilier. En 2004 à Tours, pour la trop grande modestie du prix de vente d’un terrain, la municipalité a été condamnée, et la délibération du conseil municipal annulée par un jugement de tribunal administratif. Car l’article L1311.2 du code des communes de la loi n° 1094 du 29 août 2002, n’évoque aucunement une redevance modeste, et dit que la finalité des baux emphytéotiques* est l’accomplissement d’une mission de service public, visant donc la population toute entière, alors qu’une mosquée ne présente qu’un intérêt particulier au seul profit des musulmans.

Tout ceci bien avant que soit décidé une refonte de la loi de laïcité.

Cet exemple illustre bien la situation actuelle. Pour subventionner l’islam, le gouvernement n’hésite pas à violer et détourner la loi de décembre 1905 par des biais législatifs abusifs appliqués par l’exécutif local.

Outre l’appui direct de la république, usant donc de fonds publics, la communauté musulmane (6 millions d’individus selon les chiffres officiels, soit 10% de la population), se voit financer leurs édifices par des tiers étrangers ainsi que par des pays tels que l’Arabie Saoudite, le Maroc, la Turquie… La ligue islamiste mondiale, organisation créditée par l’Arabie Saoudite, a par exemple contribué à la construction de la mosquée d’Evry, et le Roi Fahd à celle de Lyon. Ceux là même qui interdisent l’existence de communautés chrétiennes et par conséquent la construction d’églises sur leur sol.

Le budget déguisé et accordé aux musulmans est sans commune mesure avec celui accordé pour la rénovation des églises.

L’ex ministre de l’intérieur ne cache pas son animosité vis-à-vis du catholicisme : « entretenir une église où se réunissent trois paroissiens une fois tous les mois c’est poursuivre une chimère » et « qu’une église soit transformée en une salle communale, où est le problème ? ».

Alors monsieur Sarközy, animosité passagère ou résurgence d’une christianophobie liée à vos véritables origines ?

A cause du manque de financement des projets de rénovations du patrimoine chrétien en France, 45000 églises et 95 cathédrales se dégradent chaque jour. Il est logique que dans un avenir proche la république prétendument laïque escompte détruire 2800 édifices ruraux.

Quel est le véritable but recherché par nos dirigeants ? Terminer le travail commencé au XVIIIème siècle par leurs « aînés dans la foi », détruire la vraie religion !

Certains catholiques se moquent et fustigent le combat contre l’immigration prétextant la hiérarchie des priorités ! Ils oublient bien souvent que le génocide ethnique par substitution engagé au cours du siècle dernier, entraîne de manière définitive la destruction de la spiritualité traditionnelle et du patrimoine français.

- Dimitri -

* Le bail emphytéotique se définit comme un droit réel de jouissance du bien d’autrui, accordé pour une longue durée allant de 18 à 99 ans, moyennant paiement d’une redevance modique.

16.1.08

L'Eglise et l'Etat

Dieu, dans son infinie sagesse, a placé le chrétien sous l’autorité de deux sociétés parfaites : l’Eglise et l’Etat. Chacune est établie sur un plan différent : le plan spirituel pour la première, le plan temporel pour le dernier. Leurs domaines d’influence respectifs sont définies par Notre Seigneur dans l’Evangile par la phrase « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Toutefois cette distinction du temporel et du spirituel que Jésus-Christ déclare est plus difficile à appréhender que la simple séparation prônée par l’hérésie laïciste. Saint Thomas d’Aquin a expliqué lumineusement les subtilités de cette distinction, dans trois principes fondamentaux.






Le premier de ces principes s’énonce ainsi : « le droit divin qui vient de la grâce ne détruit pas le droit humain qui vient de la raison naturelle ». Le droit divin régit les relations des hommes avec Dieu, et concerne donc seulement l’Eglise. La raison naturelle est ce qui découle de l’ordre créé par Dieu, c’est la loi qui gouverne la société des hommes, à savoir l’Etat. Ce premier principe explique donc que la loi de Dieu et la loi des hommes ne peuvent être contradictoires, puisque les deux émanent de Dieu. On peut essayer de comprendre ce premier principe sur une échelle plus réduite en le reformulant : ce qu’il est juste de faire pour Dieu ne peut être en contradiction avec ce qu’il est juste de faire pour son prochain. De ce premier principe on déduit :


- la distinction entre les pouvoirs de l’Eglise et ceux de l’Etat.


- l’harmonie entre ces deux sociétés.



Le deuxième principe réside en la distinction des domaines temporel et spirituel. Jésus déclare à Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde ». De fait, l’Eglise est fondée libre de toute domination temporelle. Elle n’est dépendante d’aucune race, aucune nation, aucun régime. En effet, au premier siècle, toute religion était essentiellement nationale, et on ne distinguait pas la morale et le social. Les Juifs, par exemple, furent incapables d’accepter le Christianisme, car ils attendaient un messie qui eût instauré la domination universelle de leur peuple. A l'inverse, l’Eglise souhaite étendre le règne du Christ sur tous les peuples. Au cours de l’histoire, tout schisme mena les dissidents sous la coupe d’un régime : qu’on pense au grand schisme d’Occident, à l’anglicanisme… L’Eglise Catholique est la seule à créer la distinction et à maintenir l’équilibre entre temporel et spirituel.



Il résulte de ce deuxième principe que l’Eglise est souveraine en tout ce qui est spirituel, c'est-à-dire en tout ce qui a trait au bien commun surnaturel. Complémentairement, l’Etat est souverain en tout ce qui est temporel, c'est-à-dire en tout ce qui a trait au bien commun naturel.




La lacune laissée par les deux premiers principes est la question des domaines où temporel et spirituel sont mêlés, par exemple en morale sociale. Le troisième principe y répond : « La société civile est subordonnée à l’Eglise ». L’Eglise est donc souveraine en tout ce qui concerne directement le salut spirituel du genre humain. Elle est également souveraine, indirectement, en tout ce qui concerne indirectement le salut du genre humain. L’Eglise peut condamner un Etat ou un chef d’Etat dont les décisions publiques seraient immorales, et annuler son pouvoir sur les citoyens.